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En léger repli en 2022, Arquus est prêt à produire « beaucoup plus »

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Malgré un programme SCORPION parvenu à vitesse de croisière, le chiffre d’affaires d’Arquus aura légèrement baissé en 2022. En cause, des exportations en baisse mais qui n’ont pas entamé la détermination du groupe. Une opportunité en remplacera une autre et, dans l’immédiat, l’inquiétude relève tout autant d’une loi de programmation militaire 2024-2030 à première vue peu favorable.

En recherche d’un nouveau souffle à l’export

Affecté par un marché export difficile, Arquus conclut l’année 2022 avec un chiffre d’affaires de 550 M€, en repli de 7% par rapport à 2021. Le dernier exercice restera néanmoins une « année record pour la prise de commandes côté France, à la fois pour SCORPION mais aussi pour le soutien », estime le PDG du groupe, Emmanuel Levacher. 

« L’année 2022 aura été celle d’une montée en puissance de SCORPION ». De fait, le programme phare de renouvellement du segment médian de l’armée de Terre aura porté l’essentiel de l’activité. Activée en mai dernier, la tranche 4 du programme ajoute 88 Jaguar, 302 Griffon et 54 Griffon MEPAC supplémentaires au carnet du groupement formé par Nexter, Thales et Arquus. Pour ce dernier, ce sont autant de kits de mobilité et de tourelleaux Hornet à assembler. De quoi offrir une vision précise de la charge jusqu’en 2025. 

Si cette année a été « satisfaisante en terme de commandes pour la France », elle aura été « un peu décevante pour les commandes et la production à l’export ». Avec seulement 100 M€ engrangés, le résultat est en effet éloigné de l’objectif de partage de l’activité à 50/50 avec le marché domestique. « Nous ne sommes pas désespérés, mais raisonnablement préoccupés », soulève Emmanuel Levacher. 

Cette baisse de régime, c’est la conséquence de plusieurs facteurs. La crise sanitaire, tout d’abord, dont les effets économiques ont grevé les budgets de défense de débouchés historiques, au Moyen-Orient par exemple. La concurrence ensuite, qui s’exacerbe dans le segment des blindés légers avec une présence de plus en plus marquée d’acteurs turcs, israéliens ou sud-coréens. L’évolution de la situation géopolitique, enfin, participe à assombrir le panorama. « Nous voyons bien que la position occidentale et française a tendance à être contestée dans certaines zones », nous explique-t-on. 

Exemple avec le Sahel et la rupture consommée des relations entre Paris et plusieurs États de la région. Bon an, mal an, Arquus y réalisait entre 30 et 40 M€ du résultat annuel. Une source importante mais désormais tarie par l’impossibilité pour une entreprise française, d’obtenir une licence d’exportation pour le Mali et le Burkina Faso. « Nous travaillons toujours avec le Niger, le Tchad, la Mauritanie et conservons des prospects avec le Sénégal et les pays du golfe de Guinée, mais nous ressentons une distanciation avec la France en général mais aussi avec le monde occidental ». 

Passé cet écueil, Arquus envisage d’inverser la vapeur dès cette année et table sur un rebond de  5 à 10% de son chiffre d’affaires. L’essentiel sera tiré par des marchés de soutien et de service, des savoir-faire qui pèsent en moyenne pour 40% de l’activité. Au-delà, « le challenge principal aujourd’hui, c’est de reconquérir des marchés export ». 

Les prospects à l’international restent nombreux, mais participent à rediriger davantage l’effort vers l’Europe. Arquus attend ainsi le résultat d’un appel d’offres estonien pour quelques centaines de véhicules blindés de transport de troupes. Le mythique VAB, cette fois en version 6×6, y était opposé aux offres en provenance de Finlande et de Turquie. L’industriel est également engagé en République tchèque, en Roumanie et en Grèce. Autant de pays avec lesquels la filière industrielle peut aussi miser sur des relations bilatérales entretenues de longue date dans le domaine de la défense.

L’un des derniers VAB Ultima CIED d’une commande pour 36 unités en cours de transformation à Limoges
« Prêts à se mobiliser »

Tous clients et marchés confondus, Arquus aura produit et livré 1277 véhicules l’an dernier, dont 1200 VT4 au profit des armées françaises, 37 Sherpa de différents modèles, 18 porteurs CAESAR et 22 blindés Bastion. Derrière le flambant neuf, Arquus aura modernisé 250 véhicules et en aura réparé 219 autres. Depuis 2019 et la livraison du premier Griffon, « la production relative à SCORPION est montée en cadence et arrive maintenant à des vitesses de croisière ». En 2022, cela s’est traduit par la livraison de 223 kits de mobilité et 221 tourelleaux téléopérés. 

Derrière ces quelques chiffres, les usines tournent en réalité au ralenti. Aujourd’hui, les trois lignes d’assemblage de Limoges, un « site capacitaire » dévolu à la production de véhicules neufs, sont bien trop calmes. Une commande de 36 VAB Ultima CIED s’achève pour l’armée de Terre, tandis que la production des 36 CAESAR appelés à remplacer ceux donnés à l’Ukraine démarre à petite vitesse. Quelques petits marchés exports éparses continuent, mais c’est tout. L’activité du site aura in fine représenté 69 000 heures de travail l’an dernier. Loin, bien loin du pic de 175 000 heures atteint en 2019. 

Dit autrement, les équipes sont « tout à fait capables de faire plus, et même beaucoup plus ». Voilà près de trois ans que le groupe s’en donne les moyens, essentiellement au travers d’un plan de transformation et de spécialisation de ses quatre sites français. À Limoges, cet investissement global de 15 M€ se manifeste notamment par la nouvelle plateforme logistique de 9000 m2 installée à proximité des lignes et active depuis le 1er janvier, regain d’optimisation à la clef. 

L’entreprise est depuis le début intégrée aux réflexions entourant la notion d’économie de guerre. Elle en a d’ailleurs déjà expérimenté quelques principes. L’augmentation des cadences, par exemple, obligatoire en 2021 pour parvenir à livrer 300 VLRA au Maroc en six mois. Six véhicules sortaient alors par jour de Limoges, contre deux par jour en moyenne. L’anticipation ensuite, adoptée pour pouvoir recompléter au plus vite le parc de CAESAR de l’armée de Terre via des achats réalisés en amont des notifications. 

Bref, ne manquent que des commandes au long cours. Commander 109 CAESAR NG d’un coup, par exemple, éviterait une production saccadée et des pertes temporaires de compétences. « La visibilité nous permet d’anticiper, et anticiper nous permet de réduire les délais et de répondre plus rapidement à des demandes urgentes », résume Emmanuel Levacher. Un mécanisme qui ne serait pas de trop pour compenser des délais de fourniture qui ont globalement doublé et pour continuer à soutenir les fournisseurs en difficulté. Certains ont déjà dû être aidés par Arquus, par le versement d’acomptes, le raccourcissement des délais de paiement, voire par l’achat de matières premières, mécanisme activé il y a peu pour aider un fournisseurs de pièces en aluminium.

Le hic c’est que, sur le plan des commandes, la LPM 2024-2030 est tout sauf une bonne nouvelle. Quand la LPM 2019-2023 avait porté l’activité d’Arquus, grâce à SCORPION ou aux programmes « à hauteur d’homme » comme celui du VT4, celle à venir acte la baisse des points de passage successifs d’ici à 2030. De 20 à 30% des cibles, soit plusieurs centaines de Griffon et de Jaguar, sont ainsi repoussés à 2035. « Ce n’est pas forcément une bonne nouvelle », souligne Emmanuel Levacher. Ces décalages ne feront par ailleurs qu’accentuer le besoin en maintien en condition opérationnel de parcs vieillissants mais prolongés, inflation des coûts à la clef. « Ce sera de toute façon nécessaire pour assurer la disponibilité de ces matériels », estime le PDG d’Arquus.

Hormis SCORPION, la copie présentée ce mardi fait l’impasse sur de nombreux sujets potentiellement structurants pour Arquus. De fait, rien n’y est dit à propos de la poursuite de l’ « ultimatisation » des VBL, de la recherche d’un successeur pour ces derniers, du remplacement des camions logistiques, des poids lourds et véhicules légers des forces spéciales (PLFS/VLFS). « Tout cela n’est pour l’instant pas clairement inscrit dans la LPM », relève Emmanuel Levacher.

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