Ground Combat Demonstration: Saab lève le voile sur les nouvelles variantes de l’AT4

AT4CS avec viseur amovible FCS51. ©Saab

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Du 3 au 4 mai, Saab Dynamics et les forces armées suédoises ont organisé l’édition 2022 de la Ground Combat Demonstration. L’occasion de réaliser des tirs en conditions réelles du missile NLAW et du Carl-Gustaf M4 mais aussi, pour la première fois, des nouvelles variantes de l’AT4 CS représentatives de la version F2 attendue en France dans les tous prochains mois.

Pour la première fois depuis 2014, une trentaine de délégations étrangères et quelques journalistes internationaux ont pu assister à des démonstrations tactiques et techniques destinées à présenter l’étendue des capacités offertes par les armes de soutien légères proposées par Saab. Étant donné l’actualité ukrainienne, qui a mis à l’honneur une bonne partie du catalogue de Saab Dynamics, cette édition 2022 a logiquement insisté sur les capacités anti-char et anti-véhicules des différents armements. Plusieurs tirs réels ont ainsi été effectués sur un char T-72 et un transport de troupes BMP. Néanmoins, les capacités anti-infrastructures et anti-infanterie n’ont pas été négligées, la démonstration tactique montrant notamment la complémentarité des différents types de munitions dans un contexte opérationnel complexe.

Au total, plus d’une cinquantaine de tirs se sont succédés sur plusieurs sessions de démonstration, de jour comme de nuit. Un parachutiste, largué à 3000m d’altitude avec son NLAW, a effectué une démonstration de tir de ce missile anti-char à usage unique. Par la suite, le Carl-Gustaf M4 a fait usage de son large panel de munitions (notamment la nouvelle munition programmable HE-448) contre des blindés, différentes infrastructures et même une cible mouvante. Mais pour la délégation française présente sur place, on se doute que l’intérêt se portait avant tout sur les dernières évolutions de l’AT4CS qui faisaient là leur première démonstration publique.

Lors des démonstrations de tirs, la véritable star du show était le Carl-Gustaf M4. Il était présenté pour la première fois avec sa munition programmable HE-448. ©FOB

L’AT4 F2 livré d’ici la fin de l’année

Pour rappel, l’armée de Terre française est le client de lancement de cette troisième génération d’AT4, qui avait remporté en 2014 l’appel d’offre Roquette NG. Contrairement à la version actuellement utilisée par les forces françaises, qui n’a été livrée qu’en version anti-char, cette nouvelle itération de l’AT4CS doit être disponible dans trois variantes distinctes : anti-blindé, anti-structure ou anti-personnel. La portée de 300m des AT4CS actuels a été accrue à 400m grâce au nouveau viseur point rouge intégré. Elle pourra même atteindre 600m avec une grande précision grâce au viseur récupérable Aimpoint FCS51.

À noter toutefois que, à proprement parler, ce ne sont pas les nouveaux AT4 F2 conçus pour les forces françaises qui ont été dévoilés durant la Ground Combat Demonstration. En effet, sauf nouvel écueil, les livraisons des trois variantes françaises ne sont attendues que dans les tous prochains mois. Lors de la Ground Combat Demonstration, ce sont donc des modèles génériques préfigurant la nouvelle génération d’AT4, dont l’AT4 F2 fait partie, qui ont été utilisés. Dépourvus de certains détails propres aux version françaises, ces modèles de démonstration restent cependant très représentatifs de ce que sera l’AT4 F2 une fois qu’il aura été réceptionné et mis en service au sein de l’armée de Terre, dans ces trois versions :

  • L’AT4CS ER (Extended Range) est la nouvelle variante anti-blindés, capable de détruire un char de combat (frappe latérale ou par l’arrière) jusqu’à 600m. Sa capacité de pénétration est donnée pour être supérieure à 460mm.
  • L’AT4CS AST (Anti Structure Tandem) est optimisée pour l’ouverture de brèches et la destruction de bâtis en combat urbain rapproché, et reste pertinente face à des blindés légers. Un sélecteur permet de régler le délai de détonation de la seconde charge, selon l’effet désiré, entre 3ms ou 27ms environ.
  • L’AT4CS HE (High Explosive) est la dernière évolution de la version anti-personnel de l’AT4. Pour des explosions à l’impact, la portée maximale est de 600m. En mode airburst, toutefois, il est possible de cibler des troupes derrière un obstacle ou dans une tranchée jusqu’à 1000m de distance. Ce dernier mode impose toutefois l’utilisation du viseur FCS51.
Résultat d’un tir d’AT4CS AST. Après avoir traversé un mur en béton, la munition a complètement détruit un conteneur. ©FOB

Les différents tirs effectués devant la presse et les délégations ont démontré l’efficacité de ces différents modèles face à leurs cibles principales, mais également leur polyvalence intrinsèque : la version AST reste redoutable en anti-personnel, et l’AST comme la HE conservent une très bonne efficacité contre les véhicules faiblement blindés.

La coopération franco-suédoise dans l’anti-char se poursuit

Lors de son discours de clôture de la première journée de démonstrations au Swedish Army Training Centre de Kvarn, le Major General Karl Engelbrektson, chef d’état-major de la Swedish Army, a insisté sur les efforts collectifs qui doivent être entrepris, tant en Suède qu’en Europe, pour pouvoir faire face au retour des conflits de haute intensité sur le continent européen. En Suède, la remontée en puissance débutée en 2014 va désormais s’accentuer, ce qui va nécessiter une étroite collaboration entre les forces armées, la société civile et les industriels de l’armement. « Désormais, le budget n’est plus le facteur limitant la croissance des forces armées, a confié le Major General Engelbrektson. Les vrais défis sont au niveau des ressources humaines, de l’entraînement et de la logistique, y compris industrielle ».

Pour effectuer une remontée en puissance rapide et fluide, les forces armées suédoises ne peuvent donc pas se permettre de blocages majeurs sur leurs programmes d’armement. Les industriels se doivent donc d’être force de proposition, et la FMV (Defence Materiel Administration, équivalent de la DGA) a pour but de faciliter l’avancée des programmes, y compris en collaboration.

Un état de fait qui devrait profiter indirectement au missile anti-char MMP français, qui devrait servir de base à un futur système franco-suédois de lutte anti-char au-delà de la vue directe (TAVD). Ce point a d’ailleurs été souligné par le chef d’état-major de la Swedish Army : « Nous avons un excellent programme de missile anti-char avec la France, entre Saab et MBDA, entre la FMV et la DGA, entre moi et mon homologue français. Les acquisitions seront conjointes, la doctrine d’emploi de ce système également, […] et l’achat des armes se fera conjointement à l’acquisition de nouveaux systèmes d’entrainement et de simulation. […] Nous progressons très rapidement sur ce programme, et nous avons déjà pris en compte ce nouveau concept dans notre organisation des opérations. »

Pour l’heure, sur ce programme, rien ou presque n’a filtré concernant la répartition exacte des tâches entre industriels français et suédois. Si le MMP est sans conteste une excellente base de travail, la Suède dispose d’une véritable expertise en matière de missiles « top attack », de liaisons de données sécurisées, mais aussi d’écosystèmes de support, d’entraînement et de simulation. À voir comment ces différentes expertises viendront se combiner à celles de MBDA afin de décupler le potentiel du MMP.