Le marché du missile va bien! « 2011 aura été une excellente année pour MBDA » a annoncé hier Antoine Bouvier, le PDG du missilier européen, durant sa présentation des résultats à la presse. Avec un chiffre d’affaires de 3 milliards d’euros et des prises de commandes qui flirtent avec les 3 milliards, soit une progression de 5% par rapport à 2010 et 15% par rapport à 2009, le groupe accélère sa mutation. Il faut dire qu’avec les différents théâtres d’opérations (Afghanistan, Libye, Côte d’Ivoire…), la consommation en munitions aura cette année fait un bon. Et 2012 se présente sous de bons auspices : « l’objectif de 3,5 milliards d’euros de prise de commande est réaliste » confirme Antoine Bouvier. Ce qui permet à ce dernier de se montrer aussi confiant: les grands contrats export. Au premier rang desquels, l’Inde. Le pays a confirmé tout début 2012 le programme de modernisation de sa flotte de Mirage 2000, dont la partie missile (Mica), qui est estimée aux alentours du milliard d’euros. Et bien sûr le contrat Rafale à venir, entré en phase de négociation, dont le volet missiles est encore plus important. Et n’oublions pas les pays du Golfe, où MBDA est fortement présent. L’Inde reste le marché « le plus emblématique » des ambitions export du missilier: de sa volonté de développer l’export (avec l’objectif d’atteindre plus de 50% de son CA, contre 30% aujourd’hui) alors que les budgets européens sont en berne; et de sa politique de développement de partenariats locaux, via des programmes d’offset et de constitution de Joint Ventures locales pour assurer la maîtrise d’œuvre des futurs programmes missiles.
Un marché domestique en mutation
MBDA a malgré tout conscience que le développement de ses produits repose sur le marché domestique, entré dans une période de disette budgétaire. « Nous évoluons vers un nouveau modèle économique » assurait le PDG du groupe, « fondé sur une relation de partenariat avec les ministères de la défense avec une vision sur le long terme ». MBDA bénéficie aussi au premier plan de la coopération franco-britannique. L’idée du » One MBDA » a été confirmée lors de la rencontre de février entre les deux chefs d’états, programmes à la clef (anti-navire léger…). Rappelons que l’objectif est d’avoir une seule filière missile en Europe et d’éviter la concurrence intra-européenne; MBDA devenant le seul grand maître d’œuvre sur le sujet. En ce sens les discussions devraient reprendre avec Sagem et Thales, qui ont des compétences missiles ainsi qu’une forte activité dans les auto-directeurs.
Phase critique pour la politique produits
« MBDA est un acteur global. Aujourd’hui il n’y a pas d’application sur lesquelles MBDA n’a pas de produit » annonce le PDG. Oui, mais l’enjeu est aujourd’hui de préparer la suite. Antoine Bouvier a cité trois domaines de développement produits prioritaires. La défense antimissile tout d’abord. Alors que le sommet de Chicago approche et se tiendra au lendemain de la présidentielle française, le PDG tire la sonnette d’alarme « Il est urgent que l’Europe reprenne l’initiative ». En clair, l’Europe a des atouts, dont le missile Aster, seul intercepteur européen capable de détruire des missiles balistiques ennemis. L’enjeu: que l’Europe ne se fournisse pas chez les américains, mais développe ses propres compétences, sinon il sera trop tard.
Autre domaine: la frappe dans la profondeur. Il faut aujourd’hui préparer la prochaine génération de missile de croisière Scalp, largement utilisé durant le conflit libyen.
Enfin, troisième axe produit : le missile de combat terrestre. On le sait, la France a acheté américain (missile Javelin), pour faire face à une urgence opérationnelle du théâtre afghan. MBDA avait de son coté développé une nouvelle version du missile antichar Milan filoguidé (ER), alors que les forces souhaitaient un missile à auto-directeur infra-rouge « tir et oubli ». Un couac aujourd’hui rattrapé, avec le développement lancé d’un nouveau missile bi-modes (vidéo et IR) adapté aux souhaits de l’armée française, le MMP. « On revient de loin » analysait Antoine Bouvier hier. Le contrat de développement et de production de ce nouveau missile de combat terrestre est attendu cette année. Reste à savoir si MBDA va réussir à amortir les sommes engagées dans le développement du Milan ER, avec un contrat qui ne pourra être que export…