Lutte anti-drones : la DGA cherche la parade

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Quelle réponse technique face à la prolifération de petits drones potentiellement menaçants ? Pour la Direction générale de l’armement (DGA), l’une des solutions tient dans le programme « Protection déployable modulaire anti-drones » (PARADE), objet d’une consultation lancée hier.

Une solution évolutive

Huit mois après avoir émis une demande d’informations sur la lutte anti-drones (LAD), la DGA passe donc la seconde avec PARADE. Selon l’avis de marché, PARADE devra assurer la protection permanente et à 360° de sites militaires ou civils situés en France ou sur des théâtres d’opération extérieure « par tous les temps, jour et nuit ». Chaque système comprendra à minima « un système C2 évolutif, un radar, un goniomètre, un système optronique et un système de brouillage ».

PARADE assurera la détection, la caractérisation et l’identification automatiques, ainsi que la neutralisation de micro et mini-drones, qu’ils soient « émetteurs ou non d’ondes électromagnétiques ». Ce système est appelé à être déplacé d’un site à l’autre.

À menace évolutive, besoin évolutif. Des prestations additionnelles sont ainsi envisagées pour renforcer ponctuellement les capacités initiales. Il pourra, entre autres, s’agir d’une adaptation à des contraintes spécifiques de déploiement, le développement et l’intégration de nouveaux capteurs et effecteurs ou encore des évolutions logicielles.

Cette définition succincte n’est pas sans rappeler le programme MILAD, dont la réalisation avait été confiée au Français CS Group fin 2017. Les huit premiers systèmes avaient été réceptionnés en 2019 par la DGA, aussitôt suivis d’une commande pour 10 unités supplémentaires. Depuis, tant les menaces que les technologies anti-drones ont sensiblement changé, motivant certainement la DGA à lancer un nouveau programme.

Vision d’artiste d’un drone neutralisé par le système Helma-P, laser anti-drones développé par CILAS (Crédits : CILAS)

Six systèmes avant fin 2022

Le besoin initial porte sur la fourniture de six systèmes, avec de premières livraisons devant intervenir au plus tard d’ici la fin 2022. Plusieurs dizaines d’exemplaires supplémentaires sont susceptibles d’être acquis sur base de bons de commande. Seuls trois candidats, individuels ou groupements, seront invités à soumissionner pour tenter de décrocher un marché évalué à 350 M€ sur 11 ans.

Les filières de défense et de sécurité françaises ne manquent pas de candidats capables de fournir une partie ou l’ensemble des briques requises. Hormis CS Group et des géants comme MBDA et Thales, le sujet devrait intéresser des petites entités innovantes comme CerbAir et MC2 Technologies.

Hasard du calendrier, le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Burkhard, était aujourd’hui chez MBDA pour une visite notamment orientée « LAD ». Très actif dans le segment des effecteurs, le missilier européen s’est rapproché de CerbAir, CILAS, Saab (Suède), Openworks (Royaume-Uni), KEAS (Allemagne) et Teledyne e2v (Royaume-Uni) pour créer le concept Sky Warden, dévoilé en février dernier.

La lutte anti-drones dans l’actualisation de la LPM

Le lancement du programme PARADE intervient à un moment charnière de la loi de programmation militaire 2019-2025. Sa révision, toujours en cours, devrait accorder une importance toute particulière au développement des capacités de lutte anti-drones, annonçait hier la ministre des Armées, Florence Parly.

Selon Florence Parly, les Armées travaillent sur deux fronts : d’une part, la R&D avec la conception des systèmes d’identification et de neutralisation de demain, et d’autre part « l’acquisition à très court terme de moyens existants pour sécuriser davantage nos installations sensibles, les évènements majeurs ainsi que nos forces déployées ».

Ce second volet, dans lequel s’inscrit PARADE, apportera « une protection particulière (…) sur une dizaine de sites essentiels ». Le ministère des Armées veillera également à équiper certains véhicules terrestres et bâtiments de la Marine nationale d’une capacité LAD. Le tout « permettra de renforcer la sécurité notamment de la coupe du monde de rugby 2023 ou bien des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 », indique Florence Parly.

Entre autres développements poursuivis par l’armée de Terre, le VAB ARLAD conçu en interne par la STAT (Crédits : armée de Terre)

Quatre VAB « ARLAD » en 2021

En attendant PARADE et de futurs autres systèmes, les Armées agrandissent ponctuellement leur arsenaux respectifs avec les moyens directement disponibles. L’armée de Terre a ainsi perçu une dizaine de fusils brouilleurs l’an dernier. Elle en attend 25 de plus en 2021.

La prise en compte de cette problématique passe aussi par ce que l’armée de Terre appelle « une adaptation réactive ». Soit, la prise en compte de toute bonne idée susceptible d’être concrétisée rapidement.

L’une d’entre elles a été reprise et développée en urgence opérationnelle par la STAT. Baptisée « ARLAD », elle repose sur un VAB intégrant un tourelleau téléopéré de 12,7 mm couplé à un radar de détection. Deux véhicules de ce type avaient été livrés aux forces à la mi-mars. Quatre exemplaires supplémentaires sont prévus en 2021 pour, à terme, porter le parc à 12 véhicules.

L’armée de Terre envisage de projeter ses premiers « VAB ARLAD » en opération extérieure dès cette année. Elle poursuit en parallèle l’amélioration de la capacité de neutralisation du système.