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Scorpion, le point de non retour.

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Déjà 10 ans que le ministère de la Défense fait la promotion de Scorpion et BOA !  Déjà 10 ans que les « terriens »  vantent les mérites du combat collaboratif, version moderne d’un concept interarmes né sous Napoléon et que les ingénieurs de la DGA en présentent les avancées technologiques, le temps réel n’étant pas la moindre. Déjà 10 ans que les « budgétistes » nous expliquent qu’un programme global, conçu comme un tout cohérent et dans sa durée de vie opérationnelle, coûtera moins cher aux finances publiques. Le concert n’a pas varié et, malgré les changements d’équipes, le discours s’est même amplifié et densifié. C’est une première victoire ! Même nos députés savent depuis novembre dernier ce qu’est Scorpion ! Voilà une seconde victoire. Petites victoires en vérité mais, à ce stade, ne les sous-estimons pas : elles réchauffent le cœur des troupes ! Car il en a bien besoin…

 

Il en a bien besoin car, malgré les kilomètres de lignes de spécifications techniques pondues par l’architecte de l’opération Scorpion, j’ai nommé la société Mars, malgré les 20 millions d’euros dûment payés à ce titre, dans le prolongement des 110 déjà réglés au titre de la BOA, malgré tout cet engagement intellectuel et cet argent public dépensé (faites le compte, on doit en être à un peu plus de 130 millions d’euros !), Scorpion prend encore du retard. L’année de délai annoncée – parce que par ailleurs on a du mal à trouver des financements publics pour moderniser et optimiser l’action de l’Etat –  pourrait même déboucher sur une annulation pure et simple.  10 ans d’efforts industriels et militaires gaspillés, qui réduisent aussi à néant la modernisation d’un outil militaire terrestre que les belles âmes et les politiques à courte vue n’ont de cesse de vouloir employer. 

 

Chaque français est un entraîneur en puissance, a-t-on coutume de dire, chaque politique est un stratège de l’action militaire, devrait-on ajouter ! Il est tellement tentant d’adapter sa vision des relations géopolitiques mondiales à la vision que l’on a des finances publiques. La défense est un service qui ne se négocie pas, devraient commencer par dire les responsables politiques. Les Anglais même, « nation de boutiquiers » comme disait de Gaulle, y consacrent 0,5% de PIB de plus que nous et, relativement aux seules forces terrestres, 1,7% de plus. Il est vrai qu’ils n’ont qu’une seule composante nucléaire. La défense d’un pays n’a pas de prix mais elle a un coût. C’est d’autant plus vrai qu’un pays comme le notre a les ambitions mondiales d’une puissance régionale. Or un programme comme Scorpion, en conférant aux forces terrestres une polyvalence d’emploi que ne possèdent pas les brigades plus classiques, répond au moindre coût à cette ambition en apparence contradictoire. C’est un programme intelligent et économe, au service d’une armée de Terre qui, depuis 20 ans, a été très employée, sur les théâtres les plus divers, parfois au mépris de certaines évidences géostratégiques.

 

C’est aussi un programme qui fait des envieux à l’étranger. Et il y en a deux types d’envieux actuellement. D’un côté, sont les pays qui, en même temps que la France dans les années 2000, ont vu dans l’impérialisme naissant des NTIC l’occasion de faire accomplir à leurs forces terrestres un bond opérationnel très important. FCS et FRES en furent les deux manifestations les plus volontaristes. Il n’en reste aujourd’hui que des morceaux épars, des bouts de programmes, malgré tout réalisés, mais sans cohérence opérationnelle et budgétaire, simplement parce que nécessité opérationnelle fait loi industrielle ! Ces pays-là nous envient d’avoir développé notre effort intellectuel, notre effort de R&T et notre effort financier là où eux ont dû renoncer : au plus près de la ligne de débouché, comme disent les militaires, celle à partir de laquelle se déploient les unités opérationnelles en vue de l’action future. La seconde catégorie d’envieux regroupe tous les pays qui, sentant plus ou moins intuitivement que la numérisation de leurs forces terrestres (une des deux ambitions de Scorpion pour les forces terrestres françaises) leur confèrerait une supériorité opérationnelle réelle sur leurs voisins, sont prêts à mettre la main au porte-monnaie, conscients  qu’ils ne disposent pas de la maturité technologique et opérationnelle pour se l’approprier au quotidien. Autrement dit, Scorpion est un excellent vecteur de l’exportation de défense française.

 

Or, cet ensemble unique d’atouts, technologiques et opérationnels, s’apprête à être au mieux retardé, au pire définitivement enterré. Il faut, au contraire, ne pas entrer dans ces querelles picrocholines  typiquement françaises et lancer Scorpion envers et contre tout, en faire même un emblème militaire et technologique, parce que c’est l’avenir de la défense française ; et ce qui n’est pas fait aujourd’hui ne le sera pas demain. Scorpion est à un point de non-retour !

   

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2 Commentaires

  1. auxsan 22 avril, 2013

    je crois que le budget est a lui tout seul au point de non retour.
    les beaux discours sont en total contradictions avec les moyens et des méthodes. le pire n’est pas encore que l’on serre le budget mais comment on l’utilise alors que des économies serait parfaitement réalisable si on se penche d’un peut plus près.

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