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MGCS: le 50/50 "a vocation à demeurer" selon Florence Parly

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Deux semaines après l’ambassadeur d’Allemagne à Paris, c’était au tour de la ministre des Armées Florence Parly d’évoquer le futur char de combat franco-allemand (MGCS), le 7 mai devant la Commission défense de l’Assemblée nationale. Un message succinct, mais qui s’est voulu rassurant quant au flou persistant autour du montage industriel du programme et des questions d’exportations qui en découlent.
 

Un char Leclerc du 501e RC en manoeuvre à Canjuers (Crédit photo: 501e RC)

Un char Leclerc du 501e RC en manoeuvre à Canjuers (Crédit photo: 501e RC)


 
« Les travaux progressent et j’espère être en mesure de rendre publiques prochainement des étapes importantes s’agissant du projet de char du futur », a expliqué la ministre des Armées. Celle-ci a par ailleurs confirmé l’objectif calendaire du salon du Bourget pour annoncer « de bonnes nouvelles montrant que ce projet est sur de bons rails ». Ne demeure dès lors qu’un mois pour clarifier deux zones d’ombre, à savoir la réglementation des exportations des futurs matériels et la juste répartition des rôles entre industriels français et allemands. Car – faut-il encore le rappeler – Rheinmetall est bien décidé à acquérir KMW, au risque de bousculer l’équilibre de la coentreprise KNDS, formée avec Nexter et co-maître d’oeuvre du projet MGCS.
 
Le CEO de Rheinmetall, Armin Papperger, l’a clairement exprimé en mars dernier : à chiffres d’affaires inégaux, montage industriel et partage de charges inégaux. La force de frappe du groupe rhénan (3,2Md€ de CA et 5,5Md€ de prises de commandes en 2018 pour sa seule division défense) pourrait lui permettre, une fois acté le rachat de KMW, de faire pencher la balance des actifs de KNDS à 75% dans le camp allemand. Et donc, de peser considérablement dans les négociations à venir concernant la répartition du travail au sein de MGCS. Un déséquilibre impensable pour la ministre des Armées.
 
« Je vais dire une chose très simple : KNDS est une entreprise contrôlée à 50 % par la France et à 50 % par l’Allemagne, et ce partage a vocation à demeurer », a-t-elle insisté. Selon cette dernière, le rabattage des cartes demandé par Rheinmetall, sous prétexte de la prépondérance de l’industrie allemande au sein du programme MGCS, « s’adresse donc à l’Allemagne, mais pas à KNDS ». À l’instar du discours prôné par Berlin au travers de son ambassadeur à Paris, la France fermerait officiellement la porte à un déséquilibre au sein de KNDS. Pas si simple… car la coentreprise est détenue à 50% par la famille Bode-Wegmann par le biais de Wegmann CO GmbH et non par l’Allemagne, ce qui rend complexe toute implication étatique dans les tractations à venir avec Rheinmetall. Difficile, pour autant, de ne pas envisager un certain degré d’ingérence du gouvernement allemand ou des ministères de la Défense et de l’Économie, tant le sujet se veut hautement politisé.
 
Structure de l'actionnariat de KNDS (Crédit photo: KNDS)

Structure de l’actionnariat de KNDS (Crédit photo: KNDS)


 
Subsiste également l’épineuse question des exportations, abondamment pointée par les députés. Une fois MGCS concrétisé, comment concevoir une politique d’exportation commune quand la position allemande relève plutôt d’un « cas par cas » largement influencé par l’opinion publique ? Ainsi, l’Allemagne a suspendu temporairement ses exportations d’armes à destination de l’Arabie saoudite sans concertation préalable avec ses partenaires européens, une décision en grande partie dictée par l’actualité internationale. L’impact n’en serait que minimal pour la France si ce blocage n’incluait pas également les licences d’exportations de systèmes n’étant « pas purement allemands mais à la fabrication desquels l’Allemagne a contribué », rappelait la Ministre.
 
La bonne tenue de ces deux projets structurants implique donc de pouvoir se mettre d’accord « a priori », insiste la Ministre, sur le fait que les systèmes d’armes qui en émaneront auront vocation à être exportés. Au risque qu’un désaccord « change complètement la physionomie des investissements auxquels nous devrons consentir, par le biais de financements d’État ». C’est pourquoi l’Allemagne et la France poursuivent actuellement les discussions sur l’établissement de minimis. Autrement dit, un seuil minimal au delà duquel aucun des deux partenaires ne sera en mesure de bloquer une licence d’exportation « avec quelque composant mineur que ce soit ». D’après Florence Parly, les concertations en cours sembleraient en bonne voie. « Nous nous parlons beaucoup et j’espère pouvoir, lorsque je reviendrai devant vous au mois de juillet, vous apporter des réponses plus complètes », a-t-elle ainsi déclaré aux députés.
 
Si les propos de Florence Parly se veulent rassurant, tant les difficultés afférentes à la concrétisation du MGCS que la question des exportations restent symptomatiques d’une fragilisation du dialogue franco-allemand. Malgré le récent Traité d’Aix-la-Chapelle et la création d’une assemblée parlementaire franco-allemande, les relations entre les deux pays sont actuellement en petite forme, faute d’écoute mutuelle. Le déclic, en ce qui concerne les exportations, pourrait in fine provenir de la population allemande. Aujourd’hui réservé aux administrations et aux industriels, le débat sur les exportations d’armement pourrait, demain, trouver une issue au travers de la définition d’un nouveau consensus national impliquant d’aller au contact du peuple allemand. Une mesure certes ambitieuse, mais qui pourrait participer à la clarification à long terme de la posture allemande, fournissant au passage les fondations sur lesquelles les programmes de coopération pourront être bâtis.

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