Principal facilitateur d’innovation de l’armée de Terre, le Battle Tab Terre a réceptionné le 18 décembre une seconde « caisse à sable numérique » FINDMP, conçue par Nexter comme un outil d’aide à la décision opérationnelle. Objectif : évaluer son potentiel et son impact pour la chaîne de commandement.
Finis les cartes plastifiées, calques et Powerpoint, FINDMP propose de concentrer une partie des instruments essentiels d’un centre opérationnel au sein d’une interface tactile unique de la taille d’une demi-table de ping-pong ou d’une mallette durcie. FINDMP repose sur des fonds cartographiques 3D et 2D (IGN, satellite, planimétrie, etc) sur lesquels sont ajoutés les calques, symboles tactiques et mouvements nécessaires à la modélisation dynamique et collaborative de la manœuvre future. Le tout, en adéquation avec la doctrine de l’armée de Terre et en parfaite interopérabilité avec les partenaires OTAN.
Conçu pour un usage aux niveaux des brigades et groupements tactiques interarmes, FINDMP se compose d’une table et de six à 10 tablettes tactiles déportées. Une fois connectées à la table « centrale », celles-ci permettent aux intervenants de travailler sur leur segment puis de l’intégrer à la manœuvre affichée sur l’interface centrale. Pour la première fois, plusieurs officiers peuvent donc travailler simultanément sur une même caisse à sable et ce tout au long du cycle de préparation opérationnelle ; du briefing à la répétition du scénario de mission.
Si aucun besoin n’a pour l’instant été spécifié par l’armée de Terre, Nexter souhaite par là anticiper l’évolution en cours vers une plus grande digitalisation de l’espace de bataille. Pour convaincre de l’utilité de ce qui est encore considéré encore comme « un jouet », le département des produits numériques de Nexter Systems a su miser sur une solution alliant la simplicité et la robustesse d’une caisse à sable classique et la puissance et la modularité d’un outil numérique. Avec à la clef, l’assurance d’un sursaut majeur en termes d’ergonomie, de traitement et de restitution de l’information. « En somme, il s’agit d’un outil d’aide à la décision opérationnelle qui augmentera les capacités de commandement », résume un responsable commercial de Nexter Systems.
Cette caisse à sable 2.0, Nexter la soumet aux évaluations techniques de l’armée de Terre depuis 2015. Le système FINDMP aura ainsi été déployé au sein de l’opération Sentinelle, dans certains régiments, lors d’exercices et jusqu’aux dernières évaluations technico-opérationnelles Scorpion menées ce mois-ci au CENTAC de Mailly-le-Camp. Autant d’expérimentations qui auront contribué à étoffer les RETEX nécessaires à l’obtention d’un système suffisamment mature décliné en deux versions.
La première, une console large sur laquelle ont été menées la plupart des évaluations depuis 2015, s’adresse plutôt au niveau division ou brigade. En effet, la table tactique large permet à un plus grand nombre d’officiers de travailler autour, dans des postes de commandement importants en bâti dur. Elle n’a pas plus de contraintes d’emploi qu’un ordinateur lambda.
La deuxième version de FINDMP est réduite à une unique malle durcie. Celle-ci est conçue pour être transportée aisément sur le théâtre d’opération aux niveaux GTIA et BIA. Son déploiement, réalisé en quelques secondes, ne nécessite qu’une alimentation électrique et un « abri » fixe ou mobile. Sa compacité lui permet en effet d’être installée dans un véhicule, une capacité déjà démontrée sur base d’un véhicule blindé multirôle Griffon. De dimensions et poids réduits, le système FINDMP « mallette durcie » intègre le même logiciel que la version « large » mais repose sur deux écrans, un tactile et un afficheur, résistants aux conditions climatiques extrêmes, aux chocs et à la poussière.
Ironie du sort, la multiplication des systèmes digitaux complique souvent la vie des militaires alors qu’ils étaient censés la simplifier. C’est pour éviter cela que Nexter s’est appliqué dès la conception de FINDMP à rendre ses deux versions ouvertes, aux systèmes d’information opérationnels existants et futurs, tant au niveau du software que du hardware.
Hors de question, côté industriel, de se reposer sur ce succès initial. Des réflexions sont déjà en cours pour proposer des versions encore plus abouties du logiciel, réflexions souvent alimentées par les anciens opérationnels recrutés par Nexter Systems. D’autres armées sont elles aussi réceptives au sursaut technologique annoncé par FINDMP, attirant une concurrence face à laquelle Nexter cherche à se démarquer en étoffant son argumentaire.
Parmi les évolutions à l’étude, le groupe français répondre à la multiplication et la densification progressive des flux de données en intégrant une couche d’intelligence artificielle dans son logiciel. Lié à cette IA, un instrument de simulation accélèrerait les capacités d’analyse et contribuerait à enrichir les comportements du logiciel en les rendant plus imprévisibles, plus réalistes. En apprenant, l’IA se ferait en outre force de proposition pour des idées de manœuvres adaptées à la situation opérationnelle, permettant aux utilisateurs de mieux anticiper la manœuvre future par la multiplication des scenarii. Une première démonstration pourrait avoir lieu d’ici quelques mois avec un acteur français reconnu dans le segment de la simulation.