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FOB interview : Charles Maisonneuve, Président de Saumur

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Un des constats mis en avant par les nombreux intervenants durant le colloque organisé par l’armée de terre sur la « sauvegarde des populations », concerne la baisse inquiétante des effectifs de l’armée de terre. Comme le soulignait Patricia Adam, présidente de la commission défense à l’Assemblée, si la France n’a plus d’ennemi à ses frontières, « il faut être prêt pour faire face à une surprise stratégique », notamment sur le territoire national. Or, continuait Etienne de Durand, chercheur à l’IFRI, la crue exceptionnelle de la Seine en 1910 ou le tsunami japonais, c’est 100 000 soldats qui ont été engagés, « en France, avec une armée de terre à 70 000, nous n’avons déjà plus les effectifs requis ». Evoquée par tous les intervenants, la réserve semble bien devenir une piste sérieuse, ces « militaires professionnels à temps partiel, avec des compétences rares » comme le décrivait le général de Villiers, major général des armées.

Réactions de Charles Maisonneuve, Président de l’association Saumur, association nationale des officiers de réserve et d’active de la cavalerie blindée, qui compte 700 membres dont la plupart sont réservistes.

 

La réserve est un thème qui est souvent revenu dans la bouche des intervenants durant le colloque. Le général de Villiers parle de « potentiel inexploité ». Qu’en pensez-vous ?

C’est effectivement une tendance lourde : les autorités, au plus haut niveau, se ré-intéressent à la réserve. Les diverses interventions de cet excellent colloque l’ont montré, les responsables politiques comme militaires, militent en faveur du développement de la réserve. Ce qui est assez nouveau. On a, dans le passé, eu droit à des déclarations d’intention mais peu suivies d’effets. Aujourd’hui, des personnalités de haut niveau s’engagent, et la réserve pourrait bien être une des pistes explorées par le Livre blanc, l’objectif s’approchant d’une sorte de garde nationale à l’américaine. Cette force serait capable de pallier le manque d’effectif de l’armée de terre  en cas de crise grave sur le territoire français.

Je tiens à souligner qu’il y a deux types de réserve opérationnelle : une de haut niveau, constituée d’officiers d’état-major, qui est très précieuse. Apportant des compétences civiles, qui peuvent, en cas de crise sur le territoire national se révéler très utiles, par exemple des médecins, juristes ou spécialistes du génie civil. Dans ce registre, on peut également s’appuyer sur les Orsem (officiers de réserves spécialistes d’état-major) pour renforcer les PC. La seconde réserve est celle des unités élémentaires, du niveau escadron ou compagnie, qui ont l’apparence d’une unité de l’armée de terre active. Cette force, sans être adaptée à des théâtres d’opération de haute intensité, peut tout à fait participer à la sauvegarde territoire nationale, apportant des effectifs conséquents. Et c’est surtout cette deuxième réserve qu’il convient de développer.

 

Etienne de Durand souligne les risques du développement des « déserts militaires ». Quel rôle pourrait jouer la réserve dans ce cadre ?

L’armée de terre a traditionnellement un ancrage fort sur le territoire national. Aujourd’hui, avec la réorganisation prévue par le précédent Livre Blanc, de très nombreux déserts militaires apparaissent dans de nombreux départements. La réserve pourrait effectivement combler ces vides, apportant une représentation de l’armée de terre. D’autant plus que celle-ci est porteuse de valeurs sociales fortes. L’armée de terre, c’est plus qu’un outil de projection, c’est une institution. L’armée de terre est une des rares administrations où l’ascenseur social fonctionne très bien. Je vous rappelle que plus de 40 % des officiers étaient à l’origine des sous-officiers. Effectivement, pourquoi ne pas créer des bataillons de réserves (200 soldats, avec quelques cadres d’active) dans des zones ou l’armée de terre n’est plus présente. Ces unités pourraient être indépendantes de celles d’active, comme le bataillon d’Île de France, en cours de création, qui est un projet pilote et qui pourrait être étendu.

 

Qu’est ce qui empêche la réserve de se développer en France aujourd’hui ?

Il faut la rendre plus attractive. Les réservistes prennent souvent sur leur période de vacances, car il n’existe pas de systèmes de compensation pour les entreprises qui les emploient. Une difficulté très contraignante pour les petites et moyennes entreprises.

Cela passe par des projets de refonte de l’arsenal fiscal et législatif. D’autant plus qu’un réserviste coûte moins cher qu’un soldat d’active. Mais il faut faire attention, comme le disait très justement lors du colloque du CDEF Joaquim Pueyo, rapporteur du budget de l’armée de terre, la réserve territoriale n’a de sens que si on ne déshabille pas l’armée d’active.

Par ailleurs, les armées elles-mêmes doivent aussi réfléchir sur les doctrines d’emploi de ces forces de réserves sur territoire national. Notamment sur la répartition des taches entre réserve et unité active. C’est un travail qui a commencé pour les unités d’active participant à une intervention sur le territoire français, ce travail doit être étendu pour les unités de réserve.

D’autant plus, qu’une montée en puissance d’unités territoriales de réservistes n’est pas si compliquée, si la volonté politique existe et que les budgets suivent. L’armée de terre dispose des écoles de formations nécessaires. Des formations pour les cadres et l’organisation de stage pour les unités élémentaires existent déjà. Ainsi par exemple l’école de cavalerie a, depuis 2008, repris des stages de formation pour jeunes aspirants issue d’écoles de commerce. Une initiative qui est suivie par d’autres écoles de formations.

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