Covid-19 : la BITD française se mobilise

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(Crédit : MBDA)


 
Entre l’effondrement des places boursières et l’arrêt de la production industrielle, il est désormais acquis que la pandémie de Covid-19 ébranlera durablement l’économie planétaire. La BITD française n’en sera pas exempte alors, pour limiter la casse, certains s’adaptent pour assurer la poursuite des activités prioritaires ou participer au renforcement des moyens sanitaires.
 
Assurer la continuité des activités prioritaires
 
Le séisme économique à venir est difficilement quantifiable et, pour l’instant, la pandémie ne laisse que peu de choix entre une fermeture pure et simple ou l’adaptation de l’activité. Passé le flottement initial, beaucoup ont choisi la solution médiane d’une fermeture temporaire le temps d’établir un plan de continuités des activités.
 
Pour les industriels français, le défi n’est pas moins de développer ou de livrer des armements neufs que de garantir le MCO des systèmes en service dans les Armées. Impensable, en effet, de se passer durant plusieurs semaines de services de soutien dont dépendent étroitement les opérations extérieures et intérieures ainsi qu’une partie du dispositif sanitaire d’urgence mis en place par les militaires. Entre autres axes d’effort, un Élément militaire de réanimation du Service de santé des Armées (EMR-SSA) est ainsi en cours de déploiement à Mulhouse (Alsace). Le transport de cette capacité spécifique du Régiment médical (RMED) de l’armée de Terre transportée au départ de La Valbonne (Ain) aura nécessité 16 camions des régiments du train. Des camions dont la maintenance ne peut être négligée, au risque de gripper la mécanique logistique.
 
Pour éviter la paralysie, les industriels mettent progressivement en place un plan de continuité des activités. C’est premièrement le cas d’Arquus, fournisseur de 90% des véhicules à roues de l’armée de Terre. Celui-ci a fait le choix de « protéger ses salariés et ses partenaires en suspendant provisoirement sa production à partir du 18 mars ». Tous ses sites ont été temporairement fermés et les employés qui y ont accès se sont tournés vers le télétravail. « Notre plan de continuité des activités prioritaires pour nos armées a été déployé avec succès, » annonçait hier le groupe versaillais sans détailler le ou les secteurs qui prévaudront.
 
Même son de cloche chez MBDA, qui a annoncé le 18 mars la suspension de la production sur ses trois sites de Bourges (Cher) et Selles-Saint-Denis (Loir-et-Cher). L’activité du missilier européen sera interrompue jusqu’au 23 mars afin « de permettre de mettre en place toutes les mesures de précaution sanitaire assurant la sécurité de tous les collaborateurs et de définir le plan de reprise progressive de l’activité ». La présentation des résultats annuels du groupe prévue le 24 mars a été annulée, conformément aux dispositions gouvernementales.
 
Pour ces industriels producteurs de systèmes complexes, l’autre principale crainte après le défi sanitaire résidera dans le maintien des chaînes d’approvisionnement. Du côté d’un grand groupe français, on s’inquiète d’ores et déjà de la « cascade de fermetures de fournisseurs ». Fragilisées par une trésorerie moins robuste, nombre de PME, ETI et start-ups n’ont pas la capacité de rebond des grands groupes et se sont dès lors résolues à fermer sine die. Gageons que l’arsenal de mesures de soutien adopté ce jeudi par l’Assemblée nationale favorisera la relance rapide de ces petites structures, sous peine de fissurer durablement le socle industriel français.
 

Le robot de décontamination Rhyno Protect développé par Shark Robotics (Crédit : Shark Robotics)


 
Des explosifs au gel hydroalcoolique
 
Quand certains oeuvrent au maintien du potentiel militaire français, d’autres ont choisi de basculer provisoirement une partie de leur activité vers la production ou le développement de solutions dédiées à la lutte immédiate contre l’épidémie. C’est notamment le cas d’Eurenco. À l’instar du groupe LMVH, ce spécialiste des explosifs a décidé de réorienter ses sites belge et suédois vers la production de gel hydroalcoolique. L’usine de Sorgues (Vaucluse) suivra dans les prochains jours pour soutenir un effort qui, selon l’industriel, « servira la collectivité et contribuera à garantir la continuité des fonctions essentielles du pays ». Cette filiale de la SNPE a en outre mis des masques FFP1 et FFP2 à disposition des autorités.
 
Autre exemple marquant avec Shark Robotics. L’entreprise rochelaise développe depuis trois semaines et sur fonds propres un dérivé « décontamination » de son robot de sécurité incendie Rhyno Protect. Télécommandé et dimensionné pour se faufiler partout, ce robot « est aujourd’hui en mesure de désinfecter, à distance, jusqu’à 20 000 m2 de surface en trois heures grâce ses buses de pulvérisation, » explique Shark Robotics. Le concept a été appliqué à grande échelle en Chine sur base du robot agricole R80 de la société chinoise XAG, entre autres.
 
D’autres pourraient suivre le mouvement, soutenus par les enveloppes débloquées en urgence par les institutions. Le ministère des Armées, par exemple, a décidé de consacrer 10M€ à l’acquisition de solutions innovantes directement mobilisables pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Mené par l’Agence d’innovation de défense (AID), ce fonds financera un ou plusieurs projets présentant une maturité technologique suffisante pour être déployés rapidement à l’échelle nationale. Plus d’informations ici.