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SCORPION XII, un pas de plus vers une première brigade « scorpionisée »

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L’élaboration de la doctrine SCORPION se poursuit dans l’armée de Terre, au gré des exercices d’expérimentation. Le dernier en date, SCORPION XII, vient de se conclure à Mailly-le-Camp (Aube) avec pour enjeu d’être au rendez-vous de la première brigade interarmes SCORPION.

Vers la brigade interarmes SCORPION

L’objet principal de ces exercices annuels reste inchangé d’édition en édition : confronter les dernières évolutions de la doctrine SCORPION aux réalités du terrain. Chaque rendez-vous relève par contre d’un clic le degré d’ambition. Quand SCORPION XI se focalisait sur le groupement tactique interarmes (GTIA), l’édition 2022 visait à éprouver le manuel d’emploi provisoire de la brigade interarmes SCORPION (BIA-S) et à évaluer les capacités à planifier et à conduire des opérations interarmes.

À la manœuvre sur le terrain, l’état-major de la 9e brigade d’infanterie de marine (9e BIMa). Sous ses ordres, quatre états-majors tactiques de GTIA factices, dont trois armés par les régiments de la brigade et le dernier par le bataillon de Chasseurs ardennais de la Brigade motorisée belge. Une présence belge récurrente et naturellement en hausse pour un partenaire associé depuis 2018 à l’élaboration d’une doctrine commune. Soit environ 6000 combattants, dont 400 en chair et en os.

L’intégration, pour la première fois, d’un GTIA belge, amène « un regard différent de celui que nous pouvons avoir en franco-français au sein de notre unité, au travers duquel nous arrivons aux mêmes conclusions parce qu’il y a des effets de convergence naturels. L’apport belge est donc très intéressant de mon point de vue », indiquait le général Hervé Pierre, commandant la 9e BIMa depuis cet été. Que le joueur soit français ou belges, ses faits et gestes étaient scrutés de près par les observateurs conduits par le Laboratoire du combat SCORPION (LCS).

Le commandant de la 9e BIMa et son état-major conduisent l’action de quatre GTIA factices

En partie simulé, l’environnement était en réalité élargi au niveau divisionnaire, la 9e BIMa occupant un fuseau lui même entouré de deux autres brigades au nord et au sud. Cette configuration « est aussi pour nous très intéressante, car on a souvent coutume à travailler vers les échelons subordonnés ».

Pour le général Pierre, cette « expérimentation vraiment passionnante » permet notamment d’appréhender l’apport du système d’information du combat SCORPION (SICS) dans la conduite des opérations. « Ce système SCORPION, c’est vraiment le combat de demain, dans la mesure où SICS est en développement et fonctionne sous forme de briques incrémentales. Il a donc besoin aussi d’une phase d’expérimentation doctrinale qui met en parallèle les choix techniques et des expérimentations de terrain ».

« J’ai une intuition profonde qui est que l’infovalorisation, donc la capacité du système à réduire la boucle de décision, peut permettre d’avoir des effets tactiques qui consistent à pouvoir se disperser et se concentrer plus rapidement (…) pour, dans un cas, échapper à la destruction et, dans l’autre, concentrer les efforts », poursuivait-il.

« Le combat SCORPION existe déjà, mais nous engage à une amélioration constante ». De fait, un gros travail de restitution et d’analyse commence pour l’armée de Terre avec, dans le viseur, un jalon opérationnel identifié de longue date : disposer d’une première brigade SCORPION projetable d’ici fin 2023. Et même si la primeur reviendra à la 6e brigade légère blindée (6e BLB), la 9e BIMa poursuit elle aussi sa transformation. Elle fût même la première à basculer dans l’ère SCORPION par l’entremise du 3e régiment d’infanterie de marine, première unité de l’armée de Terre « transformée » sur Griffon.

Des PC miroirs pour gagner en résilience

S’il se veut global, le travail mené durant ces 10 jours aura également porté « sur des points d’effort particuliers ». L’un d’entre eux portait sur la résilience des postes de commandement. Moins menacés lors d’opérations récentes, les PC sont des cibles que « l’adversaire, dans un combat de haute intensité, va chercher d’abord à détruire ».

« Au plus vous êtes statiques, au plus vous êtes une cible facile. Si on détruit le PC, on détruit la tête qui commande la brigade », souligne le général Pierre, ajoutant que « la protection des PC est quelque chose qui a pris une importance singulière ». Cette vulnérabilité « retrouvée », le conflit russo-ukrainien l’a plusieurs fois démontrée. Et si la trajectoire de préparation de la brigade ne change pas, celle-ci y incorpore forcément les premiers RETEX de l’Ukraine. « C’est évident, et ce serait aberrant que nous ne soyons pas à l’écoute de ce qu’on peut observer ».

« Aujourd’hui, nous essayons de trouver des structures de PC différentes, notamment la structure ‘miroir’ qui permet de dédoubler le PC pour être beaucoup plus rapide et pouvoir être moins vulnérables aux frappes d’artillerie ». Entièrement motorisés et sous blindage, ils gagnent en mobilité et en discrétion, et par là en agilité tactique et en résilience. Grâce au dédoublement, « si l’un des PC est détruit l’autre peut continuer à commander ».

L’intérieur d’un Griffon EPC, un atout en matière de mobilité. « Pour ceux qui sont un peu anciens, on mesure le chemin parcouru et la qualité des équipements qui nous sont proposés aujourd’hui. Le tout c’est vraiment de ne pas en faire une finalité mais de voir comment traduire les progrès techniques en effets sur le terrain ».

Le modèle a néanmoins ses limites. « En formant deux PC symétriques, nous avons quand même une forme de désoptimisation puisqu’on sépare des personnels habitués à travailler ensemble », complète le commandant de la 9e BIMa. De même, certains postes, de part leur expertise unique, ne peuvent être dédoublés. Un écueil qu’un système de nouvelle génération comme le SICS devrait permettre de surmonter partiellement.

Aujourd’hui, cette structure miroir fonctionne. Elle fonctionne « mais nous détectons des choses à améliorer, soit d’un point de vue technique, soit pour modifier la doctrine ». À première vue incompressible, le temps nécessaire pour transmettre les informations lors d’une bascule est un exemple d’amélioration envisagée. Cette structure, « une parmi d’autres », n’est en tout cas pas appelée à devenir la norme. « Nous estimons que cela est nécessaire lorsque la situation est très critique, lorsque la brigade est dans une phase de combat de haute intensité nous obligeant à être relativement rapides ».

Derrière la survivabilité de la « tête pensante », les affrontements en Ukraine rappellent l’importance des structures de l’avant, la reconnaissance par exemple, et de l’arrière, donc le soutien et la logistique. « Là encore, il nous faut réfléchir à un affrontement où les conditions d’engagement d’une division ou d’une brigade nous obligent à se pencher sur la mobilité stratégique ». Une problématique moins travaillée depuis une vingtaine d’années et que l’armée de Terre se réapprorie pour mieux l’intégrer dans la bulle SCORPION.

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