LOADING

Recherche

Partager

Fortement médiatisée, l’opération « Haw Bi » (« Vache noire »), première action concrète de la Force Conjointe (FC-G5S) du G5 Sahel (Mauritanie, Niger, Tchad, Burkina Faso et Mali) lancée le 28 octobre, ne serait-elle qu’un mirage médiatique ? Car, passé l’auto-congratulation des autorités, la faiblesse de l’équipement et l’absence totale de support logistique des forces africaines engagées posent la question de leur dépendance envers l’aide militaire française.
 

Une colonne de véhicules maliens et français en mouvement pendant l'opération Haw Bi (Crédit photo: EMA)

Une colonne de véhicules maliens et français en mouvement pendant l’opération Haw Bi (Crédit photo: EMA)


 
Pour cette mission inaugurale, ce sont quelques centaines de militaires maliens, nigérians et burkinabés qui sont actuellement déployés dans la région du Liptako-Gourma, épicentre de la recrudescence des attaques terroristes. Cette opération, dépourvue de réels enjeux militaires, « vient concrétiser la montée en puissance de cette force, soutenue par Barkhane, qui montre la prise en main par les États sahéliens de la lutte contre le terrorisme », s’est félicitée la ministre des Armées française Florence Parly le 2 novembre dernier dans un communiqué.
 
Certes, montée en puissance il y a, mais celle-ci prendra encore beaucoup de temps. Les premiers retours de Haw Bi glanés par les journalistes français rappellent en effet un scénario maintes fois répétés auparavant : un rafistolage dont le succès dépend autant – voire davantage – de l’encadrement étranger que des forces locales. Un schéma déjà répété une vingtaine de fois depuis 2015 mais sans grand succès, les djihadistes reprenant rapidement le contrôle des zones provisoirement sécurisées.
 
Les forces maliennes (FAMa), pour ne citer qu’elles, sont « clairement incapable de mener seules une opération de cette envergure », révèle un officier Français à nos confrères de RFI. Elles ne sont pas autonomes en eau ni en nourriture, l’approvisionnement n’étant pas coordonné, et ne sont pas toutes équipées de gilets pare-balles ni de véhicules blindés.
 
Déminage et sécurisation des zones de bivouac, coordination opérationnelle et tactique, protection au sol et dans les airs : sans Barkhane, pas de Haw Bi. Autre son de cloche, par contre, dans la presse malienne, qui souligne que « pour être efficace, cette force africaine doit être autonome dans ses opérations » et qui se demande si la France « qui veut jouer un premier rôle dans ce projet, laissera-t-elle l’initiative des opérations militaires aux commandants de la force conjointe du G5 Sahel ? ».
 
Il est clair, néanmoins, qu’au sol, l’expérience des soldats africains est  un atout dont ne peuvent se passer les troupes françaises. Rompus à l’environnement de la bande sahélo-saharienne, les membres de la FC-G5S connaissent le moindre chemin, le moindre obstacle susceptible d’arrêter la colonne motorisée.  « Pour eux, c’est plus facile de distinguer un terroriste d’un paysan, il sont chez eux. Et leur connaissance du terrain est primordiale », explique le capitaine d’infanterie français Gauthier à l’AFP.
 
Finalement, Haw Bi aura pour objectif non seulement de montrer que la FC-G5S est désormais prête à « mener » les activités de sécurisation, mais également à induire un effet d’entraînement pour accélérer son financement. Et, accessoirement, de fournir à terme une porte de sortie aux 4000 militaires de l’opération Barkhane.
 
De fait, le cœur du problème reste sans surprise la faiblesse des financements. La FC-G5S peine à mobiliser les fonds nécessaires à son fonctionnement et n’a rassemblé, du moins en théorie, qu’un tiers du budget requis, estimé à 423M€ par l’ONU. Outre l’aide de 8M€ promise par le président Emmanuel Macron pour cette année ainsi que la livraison de 70 véhicules militaires, l’Union européenne engagera 50M€ et les cinq pays du G5 Sahel 10M€ chacun.
 
Face à l’urgence, Macron a en parallèle multiplié les efforts pour intégrer son partenaire américain au processus d’aide. Avec succès : le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson s’est engagé le 31 octobre à débloquer jusqu’à 60M$ d’aide (51,5M€). « C’est un combat que nous devons gagner, et cet argent va jouer un rôle-clé pour y parvenir », a insisté le chef de la diplomatie américaine dans un communiqué.
 
Sauf que… la FC-G5S espère atteindre d’ici mars-avril 2018 sa capacité nominale de 5000 hommes répartis dans sept bataillons, à savoir deux pour le Mali et le Niger, et un chacun pour le Tchad, le Burkina Faso et la Mauritanie, avec pour centre de commandement général, la ville de Sévaré, dans le centre du Mali. Une fois la FC-G5S financée et entraînée, il faudra encore que son action militaire s’inscrive dans le temps et de manière autonome. Sérieux défi en perspective.

Tags:

Laisser un commentaire

Your email address will not be published. Required fields are marked *