Voici maintenant quatre ans que Nexter place ingénieusement ses pions sur l’échiquier kazakh. Et avec raison, car le savoir-faire du groupe français, et tout particulièrement de son pôle équipement, est aujourd’hui courtisé par une armée kazakhe désireuse de se départir de l’industrie russe, dont dépend encore l’écrasante majorité de son matériel militaire.
Thales, MBDA, Safran, Airbus : tous les géants de la BITD française avaient répondu présent à la dernière édition du salon KADEX, organisé la semaine dernière à Astana. Sans oublier une poignée d’ETI innovantes, à l’image d’Alsetex (groupe Lacroix) et Roxel, détenu à parts égales par Safran et MBDA. Mais l’évolution la plus marquante reste celle entreprise par Nexter qui, en trois participations, n’a fait qu’étoffer le panel des technologies présentées. Exit les seuls prospectus, le groupe se déplace désormais avec de vrais systèmes. Un pari gagnant, grâce, notamment, au drone Nerva, pour lequel les ministre de la défense et ministre de l’aviation et de l’industrie de défense, en visite sur le stand Nexter, « ont tout de suite demandé des présentations », nous explique Philippe David, directeur régional Europe et Asie centrale.
Selon Nexter, le pod canon de 20 mm NC621 est certainement le prospect le plus avancé. Il serait susceptible d’armer la douzaine d’hélicoptères H145M en service dans la force aérienne kazakhe. « Des présentations ont déjà été réalisées, en plus de la participation de l’entreprise à un séminaire début 2018 », ajoute-t-il. Nexter Equipment se place également sur le programme de modernisation des véhicules blindés, pour lequel la division propose, entre autres, les sièges Safepro, les optiques ViPer d’OPTSYS, et les systèmes de filtration NRBC de NBC-Sys.
Mais le programme kazakh le plus marquant resterait l’achat de nouveaux véhicules blindés 8×8. Difficile de ne pas penser au VBCI, une plateforme éprouvée au combat et sur le point d’engranger de premiers précieux points à l’export au Qatar. « On sait qu’il y a un besoin », nous confirme David. Le principal concurrent, le Barys 8×8 de KPE, est actuellement en cours d’évaluation par l’armée kazakhe. D’après Azat Myrzagaliyev, ingénieur projet pour KPE, les évaluations par grand froid se sont déroulées sans anicroches et devraient être suivis d’essais plus poussés durant l’été. Les conclusions tirées feront l’objet d’un rapport qui viendra conclure le « Plan A » kazakh. De la bonne conduite de ce dernier dépendra ensuite le lancement d’un « Plan B », autrement dit une compétition en bonne et due forme dans laquelle la variante VBCI T40 serait pré-selectionnée en compagnie d’ un ou deux concurrents, révèle David. Ni calendrier, ni chiffres, ni budget précis pour l’instant, mais une autre porte entrouverte dans laquelle Nexter pourrait s’engouffrer.
Reste, sans surprise, à trouver les financements car avec moins de 0,8% de son PIB – soit 1,184Md€ – investis dans la défense en 2017, le Kazakhstan reste bien ancré dans le peloton de queue mondial. Il faudra pour cela qu’Astana confirme la relance économique annoncée pour 2018, soutenue par l’envolée des cours des hydrocarbures. Une manne financière représentant 57% des exportations kazakhes et indispensable pour rehausser les dépenses militaires.
Quant à la création d’une joint venture, condition sine qua non pour intégrer le marché kazakh, « Nexter, quel que soit le pays, est prête à discuter avec l’industrie locale pour établir une forme de coopération. Il faudra trouver un ou des partenaires qui aient le savoir-faire nécessaire ». Loin de se limiter aux salons et autres arcanes ministérielles d’Astana, le travail de prospection de Nexter a aujourd’hui abouti à un rapprochement sensible avec les principaux conglomérats de la jeune industrie de défense locale, tels que Kazakhstan Engineering (KAE) et Kazakhstan Paramount Engineering (KPE), filiale du groupe sud-africain Paramount. Les succès engrangés dans le passé par Thales, avec Granit-Thales Electronics, et d’Airbus Helicopters, avec Eurocopter Kazakhstan Engineering, confirment à juste titre l’intérêt d’un rapprochement avec les acteurs locaux.
Pour l’heure, rendez-vous est pris entre Nexter et deux à trois délégations kazakhes pour Eurosatory, avant une première présence du groupe terrestre au salon ADEX, organisé à Bakou en septembre prochain.