La défense anti-aérienne de l’Arménie sera renforcée de radars et missiles sol-air fournis par Thales et MBDA, pan industriel d’un partenariat de défense scellé ce lundi à Paris par le ministre des Armées Sébastien Lecornu et son homologue arménien, Suren Papikyan.
À nouveau menacée par son voisin azéri, l’Arménie a acté avant hier l’acquisition de trois radars Ground Master 200 (GM200) auprès du groupe français Thales pour muscler son bouclier anti-aérien et renouveler une capacité globalement héritée de l’époque soviétique.
La détection n’a de sens que si elle se complète de moyens d’interception, soulignait Sébastien Lecornu en marge de cette troisième rencontre bilatérale en l’espace d’un an. Erevan a donc signé une lettre d’intention avec MBDA pour l’acquisition de systèmes Mistral 3. L’ensemble doit fournir aux forces arméniennes « une défense du ciel qui soit la plus efficace possible ».
« C’est un des grands retours d’expérience de l’Ukraine. Face aux attaques de drones et de missiles, la protection du ciel est quelque chose d’absolument clé pour protéger les troupes et les populations civiles », commentait Sébastien Lecornu.
Le ministre français aura insisté à plusieurs reprises sur le caractère défensif de l’aide française. « Ce sont des systèmes d’armes qui par leur nature même ne peuvent être mis en oeuvre que parce qu’il y a une agression sur le territoire arménien. (…) Personne ne peut reprocher à un État souverain de protéger son ciel et la population qui est en dessous ».
Pour Thales, ce contrat vient étoffer un carnet de commandes déjà bien rempli. Après une commande moldave et les perspectives en Irak, l’Ukraine a émis le souhait d’acquérir deux radars GM200 potentiellement livrés l’an prochain. Ils viendront s’ajouter à l’exemplaire financé via le fonds de soutien abondé par l’État français.
Ni les montants, ni les calendriers de livraisons n’ont été détaillés, mais tant la commande de GM200 que celle envisagée pour le Mistral interviennent sur fond d’accélération des cadences. La production de missiles Mistral est ainsi passée de 20 à 40 par mois, quand celle des radars a doublé, rappelait le ministre des Armées le 17 octobre lors d’une visite sur le site roannais de KNDS France (Nexter).
Si la défense sol-air est prioritaire, elle n’est pas le seul investissement consenti. L’Arménie vient également de commander des jumelles multifonctions auprès du groupe Safran. « Vous avez besoin de capteurs, vous avez besoin d’éléments de renseignement et Safran vous propose un contrat clé en main sur ce type d’instrument », notait le ministre des Armées.
Ces achats auprès de la BITD française ne sont qu’un volet d’un partenariat de défense stratégique similaire à celui officialisé il y a peu avec la Moldavie. Engagé à l’été 2022, ce rapprochement se poursuit sur fond d’offensive éclair déclenchée par Bakou dans l’enclave à majorité arménienne du Haut-Karabakh.
« L’actualité du mois de septembre et les graves événements n’ont pas remis en cause la stratégie, bien au contraire », relevait Sébastien Lecornu. « Il est temps d’inscrire notre coopération sur une base institutionnelle à plus long terme grâce une planification conjointe et au renforcement des capacités opérationnelles », déclarait Suren Papikyan.
La création d’une « intimité stratégique » reposera sur plusieurs piliers. À l’instar de ce qui a été promis au partenaire moldave, la France a décidé il y a un an d’ouvrir une mission de défense au sein de son ambassade d’Erevan. Elle propose désormais d’insérer un conseiller militaire aux côtés de la présidence arménienne, un officier appelé à agir au titre de « consultant en matière de réforme et de transformation ». La démarche se complète de la réalisation d’un audit de la défense anti-aérienne arménienne « pour réfléchir aux besoins puisque ces radars et ce dispositif sont évidemment une première étape ».
La transformation de l’appareil sécuritaire arménien sera ensuite accentuée par des moyens de formation. Une lettre d’intention sera « bientôt » signée par les académies militaires de chaque pays pour « permettre, justement, de fonder et d’instituer dans la durée la coopération en matière de formation ».
Sur ce volet, « les choses vont aller très vite ». « Les premières visites auprès des écoles de Saint-Maixent [École nationale des sous-officiers d’active] et de Saint-Cyr [École spéciale militaire] ont déjà eu lieu. Les jumelages entre officiers vont se faire dans les toutes prochaines semaines », annonçait le ministre français.
Autre dispositif évoqué, des missions de formation pourront être déclenchées sur le sol arménien dans trois domaines du combat d’infanterie : le combat débarqué, le combat de montagne et le tir de précision. En cas de feu vert, l’envoi de détachements d’instruction opérationnelle pourrait se matérialiser dès fin 2023, début 2024.
Crédits image : Thales