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La présence française à DefExpo India 2018 : remplacer la Russie!

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Dans le climat très tendu qui règne entre la Russie et les Occidentaux – surtout les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France – depuis le tir de 103 missiles de croisière sur des objectifs syriens strictement liés aux armes chimiques, la présence de sociétés actives dans le domaine de la défense à un salon en Inde (DefExpo India 2018), aussitôt suivi d’un autre en Malaisie (DSA 2018), revêt un intérêt imprévu. On imagine aisément que, entre les représentants de ces diverses sociétés, on s’adresse tout au plus des sourires crispés lorsqu’on en vient à se croiser dans les allées du salon, surtout DSA 2018 à Kuala Lumpur qui a ouvert ses portes ce dimanche 16 avril, lendemain du raid aérien occidental sur la Syrie…
 

A DefExpo India 2018, Nexter promouvait surtout son obusier automoteur Caesar sur châssis 6x6 et 8x8 ainsi que son obusier traté Trajan, sans oublier un vaste éventail de munitions  (Photo : Army Recognition)

A DefExpo India 2018, Nexter promouvait surtout son obusier automoteur de 155mm/52 calibres « Caesar » sur châssis 6×6 et 8×8 ainsi que son obusier tracté « Trajan », sans oublier un vaste éventail de munitions (Photo : Army Recognition)


 
Pourtant, tout avait plutôt bien commencé, malgré une organisation chaotique du salon DefExpo India 2018 à Chennai (anciennement Madras), sévèrement critiquée par la presse indienne elle-même, tant les changements de lieu et de date ont causé des difficultés parfois insurmontables pour bon nombre d’exposants.
 
Il convient d’observer les choses à la lumière de la visite effectuée en Inde par le président Macron, du 9 au 12 mars, où ce dernier et le Premier Ministre Narendra Modi ont clamé haut et fort leur intention de renforcer encore leur coopération en matière de sécurité et défense. En tout, quatorze pactes ont été signés entre les deux pays dans les domaines clés de la défense, la sécurité, l’énergie nucléaire, la protection d’informations classifiées et dans une série d’autres domaines, tous civils. La France est déjà fortement impliquée dans des programmes en cours ou en préparation, dans les diverses composantes des secteurs air, terre et mer. Le tout sous l’éclairage d’une obsession du « Make in India » tout azimut, un mot d’ordre que la réalité des possibilités technologiques et industrielles oblige à considérer avec une certaine prudence. L’emploi forcené du mot d’ordre agace d’ailleurs les chefs militaires lorsqu’ils peuvent exprimer leur vue réaliste de la gestion actuelle des marchés d’armement.
 
La France vise ni plus ni moins que prendre la place de la Russie comme principal partenaire de l’Inde, mais les Russes et les Américains ne se laissent évidemment pas faire et rivalisent dans une surenchère audacieuse de propositions dans les sphères air, terre et mer dont on peut se demander dans quelle mesure les Indiens eux-mêmes seront capables de les mener à bien. Du moins à court terme. Et compte tenu du problème que les Indiens sont les champions du monde en matière d’annulation d’appels d’offres, relancés plus tard, de nouveau annulés puis relancés sous une forme modifiée, le sous-continent n’est pas sorti de l’auberge. Ses partenaires et fournisseurs non plus. Le vieil adversaire chinois, naturellement absent de ce salon, doit rire sous cape…
 
A l’issue de la visite présidentielle française en Inde, les deux pays ont formulé une « Vision stratégique conjointe sur la coopération franco-indienne dans la région de l’Océan indien ». Son spectre est large. Le commerce et l’industrie ne sont jamais loin dans ce type de document : les échanges entre les deux pays ont atteint une valeur de 8,84 milliards d’euros en 2016-2017.
 
A partir de 2019, l’Inde devrait commencer à prendre livraison de ses 36 Rafale achetés en 2016. Les Indiens apprécient énormément la coopération avec la France en matière de sous-marins, et Naval Group se déclare enchanté de la mise en œuvre de ce programme. On peut également parler missiles avec MDBA, hélicoptères (Airbus est de très bonne humeur), artillerie, munitions, etc. Bref, un éventail de coopération militaire déjà (très) satisfaisant et très prometteur. On pourrait aussi y ajouter le nucléaire civil.
 
Citons trois exemples (d’autres mériteraient certes aussi d’être présentés) de la participation française « terrestre » à DefExpo India 2018 qui donnent un aperçu des voies empruntées pour conquérir une place privilégiée dans le secteur de la défense indienne.
 
Le consortium Larsen & Toubro-Nexter – qui collabore depuis 2011 sur l’un des principaux programmes indiens d’artillerie – assurait la promotion de son obusier tracté de 155mm/52 calibres « Trajan », dont la version Caesar sur châssis 6×6 est réputée pour ses performances, et sur châssis 8×8. Les Indiens ont soumis le Trajan à une série d’essais de tirs et de mobilité très durs en conditions extrêmes. Les artilleurs ont exprimé leur admiration pour les résultats atteints. Par ailleurs, la coopération avec la société indienne Premier Explosives Ltd est bien engagée.
 
Thales a signé un MoU avec la société indienne MKU pour produire localement son fusil d’assaut ambidextre F90MBR (Modular Bullpup Rifle). Il s’agit de la nouvelle génération du F90 actuellement en service dans l’armée australienne et interopérable avec les fusils en dotation dans les armées des pays OTAN.
 
Eurenco a mis l’accent sur trois produits : des charges modulaires pour obusiers de 155mm (notamment pour le programme indien BMCS), des poudres pour munitions de petit calibre (réponse au programme indien d’acquisition de nouveaux fusils d’assaut et de munitions en 5,56 et 7,62mm), et enfin des chargements explosifs, dont ceux pour des munitions insensibles qui pourraient intéresser l’Inde prochainement. De beaux contrats doivent encore rester sous le boisseau mais feront l’objet de communications en temps opportuns.
 
La richesse de la participation française à DefExpo India 2018 mériterait davantage d’espace que nous n’en avons ici pour donner une image qui reflète l’ampleur des efforts massivement déployés par les exposants pour conquérir ou renforcer leurs parts de marché dans le secteur de la défense. La suite de l’histoire est en train de s’écrire à Kuala Lumpur, au salon DSA 2018. Et en Syrie ? Wait and see…

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