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« Nous n’avons aujourd’hui qu’un mot d’ordre: la confiance retrouvée et l’exigence qui va avec », déclarait Emmanuel Macron lors de ses premiers vœux aux armées, présentés vendredi dernier à Toulon. Dans un discours autoritaire et direct, rythmé par les innombrables martèlements de son pupitre, le président de la République est revenu sur les succès engrangés et a confirmé certains des grands chantiers repris dans la prochaine LPM: effort budgétaire, OPEX, innovation et coopération.
 

Emmanuel Macron en visite sur le BCP Dixmude pour ses premiers voeux aux Armées, le 19 janvier 2018

Emmanuel Macron en visite sur le BPC Dixmude pour ses premiers voeux aux Armées, le 19 janvier 2018


 
« Je veux, par des mesures pratiques et de bon sens, régénérer nos armées et redonner une pleine cohérence à notre modèle », a affirmé Macron. Six mois après la démission inédite du CEMA, le général Pierre de Villiers, le président de la République se devait de restaurer la confiance et de réconcilier l’Elysée et l’hôtel de Brienne. Nul recadrage donc, mais des promesses et, surtout, beaucoup de contreparties.
 
« LPM après LPM, même si une certaine sagesse a conduit à garder un modèle complet, celui-ci connaît aujourd’hui des difficultés liées aux décisions prises lors des LPM précédentes », rappelle Macron. Il est donc urgent de corriger le tir, tout d’abord en matière de finances. Pour régénérer le modèle d’armée français, « j’ai tout d’abord décidé qu’un effort budgétaire inédit serait fait dans le domaine de la défense ». La loi de finances pour 2018 s’élèvera donc comme prévu à 34,2Md€, soit 1,8Md€ de plus qu’en 2017. La trajectoire de la LPM récemment validée par Macron en Conseil de défense portera le budget des armées à 2% du PIB en 2025 (soit à la fin d’un éventuel second mandat et un an après l’échéance demandée par l’OTAN) grâce à des socles financiers successifs de 1,7Md€ par an jusqu’en 2022, et de 3Md€ en 2023. Autrement dit, l’effort principal est reporté sur les dernières années du mandat présidentiel.
 
Mais la France ne signera pas de chèque en blanc. Car sur l’utilisation des budgets, l’Elysée sera « d’une exigence absolue », réclamant notamment de la ministre des Armées de lui rendre compte « très régulièrement des résultats obtenus ». De même, Macron a insisté sur la responsabilisation des armées vis à vis d’efforts financiers qui « se traduiront (…) par une réduction des ressources accordées à d’autres politiques publiques »… En conséquence, l’Elysée veillera à ce que « chaque euro dépensé contribue directement et efficacement à l’amélioration de votre outil ». Tout est dit.
 
L’effort de sincérisation des budgets se poursuivra donc, au cœur duquel se situe celui des opérations extérieures (OPEX), « qu’il convient d’ajuster ». Sous estimés depuis des années, les coûts des OPEX donnent droit à des batailles budgétaires de fin d’année « parfois vives (…) qui laissent des cicatrices profondes » et ont « parfois de lourdes conséquences en matière de confiance mutuelle ». « Ces batailles, (…) je n’en veux plus », a exigé Macron tout en confirmant le renforcement de la dotation annuelle des OPEX, qui passera de 450M€ à 1,1Md€ en 2020.
 
Afin de maintenir le rythme imprimé par trois théâtres d’opérations extérieurs majeurs « sans doute pour encore plusieurs années », les Armées doivent en outre jouir d’un matériel moderne, soutenu par un MCO refondu. La modernisation des équipements est certes avancée, mais reste impactée par les LPM précédentes, explique Macron, qui évoque une « situation critique dans certains segments ». Pour l’armée de Terre, l’effort portera, sans surprise, sur le segment des véhicules blindés médians (programme Scorpion), « celui qui est le plus engagé en opération ». La priorité portera également sur le renseignement, avec la création d’une « posture permanente du renseignement » et s’appuiera sur un segment spatial renouvelé et « de nouvelles capacités de recueil de renseignement », tels que de nouveaux drones MALE et avions de surveillance et de guerre électronique.
 
Au delà de la modernisation des matériels, le ministère des Armées devra s’attacher « à garantir la soutenabilité et la cohérence du modèle d’armée » en privilégiant l’innovation, autre cheval de bataille du président. « Enviées par nos partenaires », la DGA doit par ailleurs « faire évoluer ses méthodes ». Et Macron d’insister sur des relations entre le ministère des Armées, la DGA et la BITD française qu’il estime « bonnes », mais sont appelées à devenir « plus efficaces et davantage mises au service de nos finances publiques ». Le président a donc plaidé pour des matériels « moins chers, encore plus adaptés, plus rapidement, avec, sans doute, un entretien plus efficace ». Les industriels devront donc progresser vers « un meilleur rapport coût-efficacité ». En effet, si Macron a réitéré le support de l’Etat envers son industrie, notamment à l’export, celui-ci attend « la même exigence, la même transparence, le même esprit de responsabilité de la part de nos industriels de défense ».
 
Dans cette Europe de la défense qui se veut renouvelée, expliquait Macron, « l’Allemagne est pour nous un partenaire primordial » et, en dépit du Brexit, « le Royaume-Uni est et restera un partenaire essentiel ». Présentée à tort comme une sorte de « cache-sexe de la réduction des formats », explique Macron, la coopération est « ce qui va nous permettre de nous démultiplier ». Mais attention, « il ne s’agit pas de faire moins, il s’agit de faire mieux, ensemble ». Il faudra par exemple mutualiser les matériels militaires afin de diminuer au maximum les standards différents et réduire les factures, a ajouté le Président.
 
Alors, la mayonnaise Elysée-Brienne prendra-t-elle ? Car si le « contrat » est maintenant clairement établi – argent frais contre fidélité -, reste à savoir si les différentes parties en respecteront les clauses. Si Macron a sûrement rassuré sur le fond, le ton adopté par ses voeux – et sa redondance de « je veux » – résonnera-t-il positivement auprès des militaires et industriels, d’autant plus venant du seul président de la Ve République totalement dépourvu d’expérience militaire ? Hasard du calendrier, ces vœux aux armées coïncident avec une baisse de la côte de popularité de Macron de 2 points en janvier (50%), une première depuis octobre 2017 selon les indices mensuels publiés par le JDD.

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