De la visibilité pour au moins 20 ans, voilà ce que promet le partenariat stratégique attribué à FN Herstal par le gouvernement belge. Un accord inédit synonyme d’autonomie nationale mais que la Belgique entend bien ouvrir à d’autres pays.
Validé en novembre dernier en Conseil des ministres, ce partenariat a connu « une avancée majeure » avec l’annonce, le 26 avril, de l’attribution de ce marché de fourniture de munitions de petit calibre et d’armes légères. Un contrat conclu pour les deux prochaines décennies et valorisé pour l’instant à 1,7 Md€, dont 1,3 Md€ engagé par le ministère de la Défense et 384 M€ par le ministère de l’Intérieur.
Le triple enjeu derrière cet investissement ? Mettre fin à une dépendance envers un fournisseur non européen avec qui la Défense réalise 85% de ses achats, renforcer la souveraineté de l’outil de défense et pérenniser la sécurité des approvisionnements par une planification dans la durée. Et, au-delà, garantir la continuité du soutien apporté à l’Ukraine dans sa résistance face à l’agression russe.
Côté industriel, ce partenariat se traduira par la création d’une soixantaine d’emplois supplémentaires à Herstal et par l’installation d’une nouvelle ligne de production à Zutendaal, site flamand du groupe liégeois. Détenu à 100% par la Région wallonne, FN Herstal n’a pas attendu le feu vert gouvernemental pour muscler son outil de production, annonçait-il en novembre. Depuis, les efforts se sont intensifiés en vue d’une augmentation significative de la production et de la réintroduction des munitions de calibres 5,56 mm et 7,62 mm.
Attribué sans mise en concurrence, l’accord aura nécessité d’activer l’article 346 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Ce serait, selon l’entourage ministériel, une première pour la Belgique, d’habitude peu encline à invoquer cette exception lui permettant de conclure un marché sans appel d’offres au titre de la protection de ses intérêts essentiels de sécurité. Une pirouette juridique dont la légalité a été confirmée par le Conseil d’État, celui-ci déboutant au passage le recours déposé par un concurrent, l’entreprise allemande Heckler & Koch.
La ministre de la Défense l’annonçait au lancement du projet : la prochaine étape consiste à ouvrir le champ à d’autres pays. L’argumentaire belge est bien rôdé. Rejoindre ce partenariat, c’est participer à augmenter les volumes et à réduire les coûts. C’est aussi s’assurer une meilleure disponibilité, un paramètre déterminant lorsque certaines commandes demandent jusqu’à quatre ans avant d’être livrées, nous explique le cabinet ministériel.
L’appel est lancé et « plusieurs pays, partenaires réguliers, ont déjà montré leur intérêt », relevait Ludivine Dedonder. C’est le cas de la France, qui cherche à consolider sa souveraineté en matière de munitions de petit calibre. Entre la relocalisation et le rapprochement avec un allié stratégique, le sujet est l’objet d’une étude menée par la Direction générale de l’armement. Ses résultats sont attendus « en avril ou en mai, ce qui nous permettra de prendre certaines décisions en la matière », indiquait en février le ministre des Armées, Sébastien Lecornu.
Crédits image : FN Herstal