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Des chiffres de l'OTAN à la loupe

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Le général Chris Deverell, commandant du commandement des forces interarmées du Royaume-Uni (crédit photo: MoD)

Le général Chris Deverell, commandant du commandement des forces interarmées du Royaume-Uni (crédit photo: MoD)

Le général Chris Deverell, commandant du commandement des forces interarmées du Royaume-Uni, a prononcé cette semaine un discours lors de la conférence internationale annuelle de développement et d’expérimentation*, organisée pour la première fois depuis 17 ans par le ministère de la Défense britannique, visant à rassurer son auditoire sur l’engagement du Royaume-Uni avec l’Europe de la Défense et l’OTAN.

Après avoir repris les mots prononcés le 22 septembre à Florence, en Italie, par la Première ministre Theresa May qui promettait que « notre engagement en faveur de la défense et même de l’avance de nos valeurs partagées n’est pas entravé » et ceux, prononcés une semaine plus tard aux troupes du UK Battle Group Group en Estonie, qu’en « quittant l’Union européenne […], nous ne quittons pas l’Europe, le Royaume-Uni s’engage inconditionnellement à maintenir la sécurité de l’Europe», Deverell soulignait avec ses propres mots que « nous continuerons à travailler avec et aux côtés de l’UE ainsi qu’avec nos voisins européens ». Puis, il rajouta, en parlant au conditionnel, que « le Royaume-Uni pourrait continuer à apporter des fonds, des compétences et des actifs à des opérations et des missions spécifiques de la PSDC (politique de sécurité et de défense commune) qui reflètent les intérêts communs du Royaume-Uni et de l’UE », et déclarait à ses auditeurs que « le Royaume-Uni veut établir un nouveau partenariat de sécurité audacieux avec l’Union européenne, reconnu par traité ». Étant donné le passé du Royaume-Uni qui s’est toujours opposé, à Bruxelles, aux réformes institutionnelles qui visaient à donner à l’Union européenne plus de poids militaire, permettez-nous d’être un peu dubitatifs.

Le général a ensuite abordé la relation entre la Grande-Bretagne et l’OTAN. Les chiffres qu’il évoquait nous ont amenés à parcourir le site officiel de l’OTAN pour les vérifier. « Nous avons le deuxième plus grand budget de défense de l’OTAN ». C’est vrai. « [Nous] sommes l’un des rares alliés qui dépensent 2% de son PIB pour sa défense ». C’est vrai aussi. Si vous regardez le tableau ci-dessous, vous verrez que les États-Unis, la Grèce, le Royaume-Uni, l’Estonie, la Roumanie et la Pologne sont les seuls États membres qui consacrent 2% de leur PIB à la défense.

Ce tableau a été compilé avec des chiffres, arrêtés au 30 juin 2017, publiés par l'OTAN sur son site WEB

Ce tableau a été compilé avec des chiffres, arrêtés au 30 juin 2017, publiés par l’OTAN sur son site WEB

Mais nous avons ensuite examiné de plus près les chiffres de l’OTAN et réalisé que l’Allemagne, qui ne se place qu’au 16e rang dans le classement par % du PIB consacré à la défense, tient en fait son 4e rang dans les dépenses militaires globales si l’on prend en considération le rapport à la taille de ses forces armées qui se classent 5e parmi les pays membres de l’OTAN. De même, la France, qui se classe au 6ème rang du classement par PIB, occupe la 3e place des dépenses globales si l’on prend en compte la taille de ses forces armées, les plus grandes parmi les alliés après ceux des Etats-Unis et de la Turquie.

Le Luxembourg, qui ne consacre qu’un maigre 0,44% de son PIB à la défense, le plaçant bon dernier du classement, est aussi dans le peloton de queue des dépenses militaires, mais il dispose des plus petites forces armées, à peine 800 personnes. Cependant, le Monténégro, devenu membre de l’OTAN en juin dernier et disposant de la deuxième plus petite force armée avec 1 500 membres et le plus petit budget de défense, occupe néanmoins une 9e place remarquable dans le classement du PIB car le peu qu’il dépense représente 1,66% de son PIB. Tout cela pour dire que ce n’est pas parce qu’une nation dépense moins de 2% de son PIB pour sa défense que ses dépenses ne sont pas proportionnelles à la taille de ses forces armées.

Deverell a également mentionné que la Grande-Bretagne était parmi la « poignée d’alliés [qui dépense] 20% sur les équipements majeurs ». Faux. Il y a 13 pays qui dépensent au moins autant et le Royaume-Uni ne se classe qu’au 10ème rang, surpassé par la Roumanie, le Luxembourg, la Lituanie, la Turquie, la Bulgarie, les Etats-Unis, la Norvège et la France, dans cet ordre.

Ce que Deverell n’a pas mentionné, c’est que le Royaume-Uni arrive en dernière position lorsqu’il s’agit de dépenses pour le personnel militaire et civil (c’est-à-dire leurs salaires) et pour leurs pensions. Il serait intéressant de savoir si le Portugal, qui occupe la première place, dépensant 78,03% de son budget en salaires et en pensions, compte des troupes plus heureuses que celles de la Grande Bretagne et si Lisbonne à moins de mal à recruter que Londres…

Figures compilées à partir de celles sur le site de l'OTAN.

Figures compilées à partir de celles sur le site de l’OTAN.

* La Conférence internationale sur le développement et l’expérimentation des concepts (ICDE) est le forum annuel du Commandement suprême allié de l’OTAN et des états-majors interarmées des États-Unis pour débattre des questions les plus actuelles de développement de concepts et d’expérimentation dans le processus de développement des capacités.

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