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Cinq questions défense à Emmanuel Macron

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Emmanuel Macron, candidat d'En Marche ! à l'élection présidentielle

Emmanuel Macron, candidat d’En Marche ! à l’élection présidentielle


Emmanuel Macron nous a envoyé ses réponses aux cinq questions concernant leur positionnement vis-à-vis de l’armée de terre et de l’industrie de l’armement terrestre que nous avons posées aux 11 candidats à l’élection présidentielle. Nous avons raccourci légèrement ses propos pour que ceux-ci correspondent au format attribué aux autres candidats.
 
1) Dans un contexte budgétaire contraint, jusqu’où peut-on consentir à un effort pour le budget de la défense ?
Je suis particulièrement conscient qu’en matière budgétaire, nos armées ne peuvent plus attendre : le renouvellement des forces de dissuasion, la modernisation des moyens militaires conventionnels, le comblement de certains déficits criants dans nos capacités rendent absolument indispensable un effort particulièrement appuyé. C’est pourquoi je prévois d’augmenter notre effort de défense, en portant les ressources de la défense à 2% du PIB en 2025. C’est un objectif très ambitieux : si on tient compte des hypothèses actuelles de croissance du PIB dans les prochaines années, ce budget atteindra, hors pensions et hors surcoûts OPEX, plus de 50Md€ en 2025, contre 32 en 2017. Le point de passage en 2022 correspondra à une augmentation du budget de près de 10Md€. Cet effort s’inscrira dans une planification à long terme. Il faut, là-dessus, tirer les enseignements des profondes modifications de notre environnement stratégique et des perspectives révisées d’engagement de nos forces. Nous engagerons donc, dès après l’élection, l’élaboration d’un nouveau Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, qui définira les grands termes d’une planification de notre défense pour les quinze années à venir. Ce Livre blanc me sera remis au plus tard en décembre, de façon à ce que nous puissions engager, dès début 2018, l’élaboration d’une nouvelle loi de programmation militaire pour la période 2019-2025.
 
2) Est-ce le rôle de l’armée d’entreprendre des opérations de type Sentinelle ?
Il faut saluer l’immense professionnalisme et la réactivité de nos soldats, qui ont une nouvelle fois démontré leur adaptabilité et leur niveau d’engagement depuis le déclenchement de Sentinelle en janvier 2015.  L’avenir de Sentinelle sera adapté, en fonction de l’appréciation de la menace terroriste sur le territoire. Nous devons éviter tout dogmatisme et être essentiellement guidés par un grand pragmatisme. Nos forces ne doivent pas être prisonnières d’une sorte de routine qui affaiblirait inéluctablement l’efficacité de leur mission et qu’elles vivraient d’ailleurs mal en tant que militaires professionnels.
 
3) Pensez-vous que l’armée de terre soit suffisamment équipée ?

L’armée de terre, comme nos autres armées, souffre de matériels vieillissants et de capacités réduites qui ne sont plus acceptables. A cet égard, la prochaine loi de programmation militaire doit permettre d’accélérer le remplacement des matériels les plus âgés. Cela impliquera notamment l’accélération de programmes tels que SCORPION pour les blindés légers ainsi que celui des hélicoptères interarmées. Il faudra également engager les programmes qui aboutiront aux successeurs des grands équipements actuels en examinant à chaque fois les possibilités de coopération avec nos partenaires en Europe. Je pense notamment au futur char de combat, successeur du Leclerc, pour lequel une coopération franco-allemande serait pleinement justifiée. Mais au-delà des grands équipements que j’ai cités c’est d’abord aux hommes et aux femmes de notre défense que je pense en premier lieu. Nous avons le devoir de leur garantir des conditions de vie professionnelle et familiale à la hauteur de leur engagement. Je serai donc particulièrement attentif à ce que les infrastructures – notamment d’hébergement -, les matériels, les équipements, soient modernisés et adaptés à l’exercice de leur mission.  Il faudra favoriser des progressions professionnelles dynamiques, mettre l’accent sur la formation mais aussi sur la reconversion, veiller à l’accompagnement des familles. Je fais par ailleurs mien l’objectif d’atteindre une force opérationnelle terrestre de 77 000 hommes.
 
4) Comment peut-on faire monter en puissance notre BITD ? Les cas de MBDA et Nexter sont-ils des exemples à suivre selon vous ?
 
L’industrie française dispose de champions mondiaux et, en même temps, d’un tissu de petites et moyennes entreprises particulièrement dynamiques. L’État devra être acteur dans cet écosystème, comme partenaire d’une économie de défense robuste et pérenne. J’assumerai donc une politique industrielle volontariste. Le premier axe de ma politique concernera l’innovation. Ainsi après les efforts des cinq dernières années, j’augmenterai encore les financements qui lui sont consacrés, en passant la recherche amont progressivement à 1Md€ annuels, contre 730M€aujourd’hui, soit plus de 30% d’augmentation. L’État devra en outre accompagner l’innovation, au travers notamment d’un fonds d’investissement qui permettra au ministère de la Défense de prendre des participations directes au capital de certaines PME stratégiques. Les dispositions du pacte défense PME lancé en 2012 seront poursuivies, avec un accent mis sur l’accompagnement territorial et sur la relation entre les PME et les grands groupes.
La politique de réindustrialisation de défense est aussi un axe que je veux encourager avec une meilleure sécurisation de nos approvisionnements. Je veux accélérer cette politique, car elle garantit notre autonomie stratégique, en limitant nos dépendances envers des pays tiers, notamment ceux qui, comme les États-Unis, n’hésitent pas à faire de leurs équipements un moyen de pression.
Par ailleurs, la période récente a été riche en consolidations industrielles dans le secteur de la défense, avec des mouvements tels que nous n’en avions pas connus depuis le début des années 2000 : vous citez KNDS dans le domaine de l’armement terrestre et OneMBDA pour les missiles. La consolidation industrielle est un enjeu majeur de développement de nos entreprises, et il reste encore beaucoup à faire, en particulier au niveau européen. Le troisième axe de cette politique industrielle volontariste, c’est une politique coordonnée et dynamique d’exportations de défense. Je poursuivrai le développement d’une politique commencée ces dernières années et dont il faut se féliciter des résultats.  Pour conserver la dynamique enclenchée, il faudra bien sûr continuer à appliquer la méthode des équipes de projet intégrées entre industriels, militaires et ingénieurs de la DGA ; c’est la marque de fabrique de cette « équipe France ». Mais nous devons également prendre acte du changement d’échelle de cette activité dans son volet de coopération entre les États. En effet, nos partenaires demandent davantage à la France de les accompagner dans la mise en œuvre des projets industriels : il peut s’agir de formation, de coopération opérationnelle, d’assistance à maîtrise d’ouvrage ou encore de participation à la sélection des offres.
 
5) Si vous arrivez à la Présidence de la République en 2017, en tant que chef des armées, quelles seront vos trois priorités en matière de Défense ?
L’Europe et la France font face à un monde nouveau où les menaces sont plus nombreuses et plus dangereuses.  Dans ce contexte, je fais le constat que notre armée est aujourd’hui une puissance militaire reconnue sur la scène internationale. Mais, utilisées au maximum de leur capacité, nos armées n’ont plus suffisamment de temps pour se reposer ni s’entraîner, faisant craindre une dégradation progressive de leur sécurité, de leur efficacité et du recrutement. Tout aussi inquiétant, leur équipement se détériore et nos dépenses militaires, rapportées au nombre d’habitant, stagnent, alors même que les conflits s’intensifient et que nombre de pays réarment. Dans ce contexte, l’objectif de ma politique de défense sera d’assurer la souveraineté de la France et de protéger les français : c’est la mission première de l’Etat. Notre pays doit disposer des moyens de défense et de sécurité nécessaires à sa souveraineté et à la protection de ses citoyens. Cela exige de donner à la défense nationale des moyens financiers et humains accrus, afin qu’elle puisse mener à bien des missions plus difficiles et plus nombreuses.  Mon premier objectif sera donc de donner aux armées les moyens d’assurer la souveraineté stratégique de la France. Cette sécurité et cette souveraineté, elles n’ont pas de prix, mais elles ont un coût. Il nous faut l’assumer. C’est pourquoi nous proposons une augmentation du budget de la Défense à 2% du PIB d’ici 2025.
Le deuxième objectif sera de développer des initiatives concrètes pour développer vraiment l’Europe de la Défense. Ainsi, nous renforcerons la coordination de nos opérations avec nos alliés européens avec un Quartier Général européen permanent pour assurer la planification et le suivi des opérations, en lien avec les centres de commandement nationaux et de l’OTAN. Nous créerons également un Conseil de sécurité européen, composé de militaires, diplomates et experts du renseignement, pour conseiller les décideurs européens. Nous activerons les « groupements tactiques » : ces forces multinationales ont été mises en place il y a plus de 10 ans mais n’ont jamais été déployées sur le terrain. Cela permettra des interventions européennes communes sur le terrain, dans les opérations extérieures. Enfin, nous soutiendrons la création d’un Fonds européen de défense, pour financer des programmes communs, tel un drone européen. Pour continuer à innover face aux géants américains ou chinois, et face aux coûts croissants des programmes d’armement, un effort en commun est clef. Mon troisième objectif sera de conforter le lien entre les armées et la nation, dans une période marquée par l’instabilité sur le plan extérieur mais aussi par la défiance d’une partie de la population vis-à-vis de nos institutions. C’est pourquoi nous revitaliserons la garde nationale et la réserve opérationnelle : la société civile doit être consciente des enjeux de défense et de sécurité auxquels notre pays fait face aujourd’hui. Nous créerons également un service national universel d’un mois. Il ne s’agit pas là de rétablir un service militaire de l’ancien temps : notre armée et nos forces de sécurité sont aujourd’hui constituées de professionnels, et la conscription n’est aujourd’hui plus pertinente. En revanche nous avons la conviction qu’il est salutaire que les jeunes Français vivent une expérience personnelle et collective de la citoyenneté, à travers des enjeux d’intérêt général dont celui de la défense nationale. Malgré des parcours souvent très divers, il faut leur redonner la possibilité de découvrir qu’il y a plus de choses qui les rassemblent que de raisons de s’opposer.

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