Exportations d’armement : après le recul, un rebond attendu en 2021

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La France aura exporté pour 4,86 Md€ d’armement l’an dernier. Soit une baisse de 41% par rapport à 2019 qui « n’était pas une surprise » pour le ministère des Armées et découle principalement des conséquences de la crise sanitaire. Ce repli pourrait être résorbé dès cette année, en grande partie grâce au Rafale.

Les prises de commande « ont marqué le pas »

« Comme l’on pouvait s’y attendre, le ralentissement des relations commerciales avec nos clients à l’export, ainsi que les ajustements budgétaires qu’ils ont dû opérer pour faire face à la crise sanitaire, ont eu un effet sur les prises de commandes », commente la ministre des Armées Florence Parly dans l’édition 2021 du rapport au Parlement sur les exportations d’armement de la France.

Contrairement aux années précédentes, 2020 n’aura pas occasionné la signature de contrats majeurs et si la BITD française s’en sort assez bien, c’est surtout grâce aux contrats inférieurs à 200 M€. Il s’agit essentiellement de contrats de maintien en condition opérationnelle, de formation ou encore de modernisation d’équipements existants. Ce socle, qui constitue la partie stable du marché, s’est élevé à 4,4 Md€, contre 3,7 Md€ l’année précédente.

Avec un quart des prises de commande, « l’Europe reste la première destination de nos exportations d’armement », rappelait le porte-parole du ministère des Armées, Hervé Grandjean, lors de la présentation des résultats à la presse. Le Royaume-Uni (290 M€) et la Grèce (282 M€) sont parmi les six principaux clients de 2020.

Juste derrière avec 24%, la zone Proche et Moyen-Orient reste un débouché primordial pour l’armement français. L’Arabie saoudite est ainsi le principal client export de la BITD française en 2020 (703 M€), et ce malgré des mesures visant à développer l’industrie de défense locale. La Défense saoudienne a notamment acquis des systèmes de défense aérienne basés sur des radars et un système de contrôle et de commandement fournis par Thales.

La zone Asie-Océanie complète le podium, suivie de l’Afrique, poussée par plusieurs contrats actés avec le Maroc pour un total de 425 M€. Derrière ce chiffre, l’achat de canons automoteurs CAESAR et les munitions associées, de véhicules Sherpa Light Scout et de missiles sol-air VL Mica et Mistral, entre autres.

Derrière la troisième place du Maroc en 2020, l’achat de véhicules Sherpa Light Scout et de canons automoteurs CAESAR (Crédits : Arquus)

Un rebond attendu en 2021

Selon le ministère des Armées, la crise sanitaire n’a pas réellement affecté les budgets militaires des États, les dépenses mondiales auraient même augmenté de 3,9% en 2020 pour atteindre 1,83 trillion de dollars. Et la tendance se confirme globalement en 2021.

La dynamique commerciale s’est par ailleurs maintenue, comme l’illustrent les 4236 licences d’exportation octroyées l’an dernier par la CIEEMG* pour plus de 125 Md€. Seul un faible pourcentage se traduira un jour en contrat, mais la stabilité du volume de licences exprime à sa manière la résilience et les ambitions de la filière française.

Passé le choc du Covid-19, plusieurs contrats de premier rang pourraient favoriser une reprise dès 2021. « Sont déjà engrangés, ou quasiment engrangés, trois projets majeurs impliquant le Rafale », rappelle le porte-parole des Armées. Il s’agit d’essais transformés ou en passe de l’être en Grèce, en Croatie et en Égypte. Une fois entrés en vigueur, ces trois contrats représenteront à eux seuls près de 7,5 Md€.

« À ces trois projets majeurs, il faut rajouter ce que l’on constate tous les ans depuis des années. C’est ce socle de 3 à 4 Md€ composé de petits et moyens contrats à moins de 200 M€. C’est quelque chose qui est très stable dans le temps », estime Hervé Grandjean.

La prudence est de mise au vu du contexte, mais « raisonnablement, nous pourrions espérer qu’à l’année 2021, nous aurions au moins 10 Md€ de prises de commande en matière de ventes d’armes ». « Au moins », car le ministère des Armées attend d’autres bonnes nouvelles. Si l’hypothèse se vérifie, la France réaliserait le troisième meilleur résultat de la décennie, après les records de 2015 (16,92 Md€) et 2016 (14 Md€).

À voir si cette tendance se poursuivra, car la crise sanitaire peut encore venir jouer les trouble-fêtes. Le ministère des Armées n’exclut pas un phénomène de « bombe à retardement » de la crise sanitaire sur les finances étatiques, synonyme de gel ou d’annulation de contrats. « Sans doute faudra-t-il attendre 2022 ou 2023 pour mesurer les éventuelles contractions budgétaires qui en résulteront », commente-t-il.

*Commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériel de guerre, chargée d’examiner les demandes d’exportation et d’émettre un avis au profit du Secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale qui, par délégation du Premier ministre, délivre les agréments préalables.