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Afghanistan : le nouveau front intérieur.

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Trois soldats australiens ont été tués et deux autres blessés hier en Afghanistan au cours de ce qu’il est convenu d’appeler une « attaque de l’intérieur ». Ces hommes ont donc été abattus par un militaire afghan, dans l’enceinte d’une base militaire.

Cette dernière attaque porte à 45 le nombre de soldats de l’Otan tués par des membres des forces de sécurité afghanes. Ces attaques, en forte augmentation depuis le début de l’année, représentent aujourd’hui 15% des pertes de la coalition. Bien évidemment, leur impact est très supérieur à qu’indique ce chiffre brut, puisque chaque attaque « green on blue » (selon la terminologie otanienne) mine durablement les relations entre troupes occidentales et afghanes.

Pour les anglo-saxons, les tirs fratricides sont du « blue on blue ». Le « green on blue » qui se développe à l’occasion du conflit afghan est un entre deux difficile à contrer, entre tir ennemi et tir fratricide. Ces attaques, finalement très faciles à perpétrer, sont devenues un puissant levier au service des insurgés, avec des effets psychologiques démultipliés par rapport à leur impact militaire réel. Sur les bases avancées et jusque sur l’aéroport de Kaboul, le port de l’arme est à présent obligatoire pour les troupes de la coalition et plus aucune enceinte n’est considérée comme sûre.

Selon des propos rapportés par le Financial Times, le général John Allen qui commande les forces internationales dans le pays, aurait expliqué que l’augmentation du nombre de ces attaques pendant le mois d’août (15 tués au sein de l’ISAF) serait due au stress lié au ramadan…  Le pouvoir afghan a une vision légèrement différente de la situation. Après quelques mois d’enquête, Kaboul explique avoir des preuves irréfutables que ces attaques sont conduites par des agents recrutés par des puissances étrangères, principalement l’Iran et Pakistan, puis infiltrés au sein des institutions afghanes. En lançant ces accusations, Kaboul compte faire d’une pierre deux coups. D’abord dédouaner ses propres forces de sécurité : les attentats ne sont pas uniquement le fait de jeunes hommes outragés par les excès occidentaux, ils sont aussi guidés de l’extérieur. Mais, ajoutent en substance les officiels afghans, « ce travail de déstabilisation est la preuve de la montée en puissance réussie de nos forces de sécurité dont nos voisins peuvent prendre ombrage ». CQFD.  Kaboul ajoute également que si des agents provocateurs ont pu passer à travers les mailles du filet du recrutement, la faute en revient aussi aux Occidentaux qui ont voulu trop rapidement gonfler les affectifs de l’armée nationale afghane.

Pour lutte contre ce phénomène, Kaboul prévoit de consacrer plus d’efforts à l’écrémage de ses recrues mais aussi au contrôle de son propre appareil de sécurité. Pour tenter d’endiguer le phénomène, il a par exemple été demandé aux nouveaux engagés dont les familles sont réfugiées en Iran ou au Pakistan de les rapatrier en Afghanistan. Mais les consignes sont difficilement appliquées et applicables : plus de deux millions d’Afghans vivent au Pakistan et  plus d’un million en Iran, ce qui fait dans un cas comme dans l’autre d’excellents viviers de recrutement.

Le bilan à tirer de tout cela est clair : que  les « traitres afghans » agissent de leur propre initiative ou qu’ils soient réellement manipulés, les insurgés, l’Iran et le Pakistan peuvent se frotter les mains. Car aux deux premiers bénéfices qu’ils peuvent en retirer, la défiance sur le terrain entre des troupes officiellement alliées et l’accélération du retrait occidental, s’en ajoute désormais un troisième : une paralysie insidieuse de l’appareil de sécurité afghan, embourbé dans ses activités d’auto-contrôle…


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