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Recruter, entraîner, transformer : les trois défis du nouveau patron de la Composante Terre belge

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La Composante Terre belge a, depuis quelques jours, un nouveau commandant. Successeur du général-major Pierre Gérard, le général-major Jean-Pol Baugnée entame un mandat qui ne manquera pas de défis, dont celui de la transformation SCORPION. 

Recruter et entraîner

Forte de 9000 hommes et femmes, la Composante Terre est la plus vaste mais aussi « la plus complexe » et « l’une des plus sollicitées », résumait le chef de la Défense (CHOD), l’amiral Michel Hofman ce mercredi devant un parterre de militaires, d’industriels et de personnalités civiles. Ancien chef des opérations à l’état-major de la Composante Terre, un temps à la tête du groupe de planification des opérations à l’Eurocorps, le général Baugnée reprend le flambeau à l’heure où les challenges se multiplient.

« Le plus grand défi de la Composante Terre, c’est son personnel », estime le nouveau Land Component Commander (LCC). À l’instar des autres composantes, celle-ci doit compiler simultanément avec un pic de départ à la retraite et les enjeux de recrutement et de fidélisation d’une Défense qui cherche à augmenter ses effectifs d’ici à 2030. « Nous avons du mal à recruter, comme dans tous les secteurs. C’est pareil en France et un peu partout en Europe de l’ouest », reconnaît le LCC. 

La problématique est connue de longue date et le ministère multiplie les mesures pour raviver l’intérêt et épaissir les rangs. L’alignement salarial avec les forces de police, par exemple, est désormais acquis. La construction de deux « quartiers du futur », ensuite, contribuera à rapprocher le militaire de son foyer. « Je crois que nous avons plusieurs atouts dans notre jeu pour agir sur le recrutement et la rétention , car ce sera indubitablement le plus grand défi de la composante dans les années à venir », insiste le LCC.

La Composante Terre fournit 70% des soldats belges déployés en opération. Le second défi sera donc celui de la préparation opérationnelle. « Il y a un état d’esprit à créer » pour continuer de hausser le niveau et s’assurer que chaque unité soit « prête à partir en permanence sur un claquement de doigts », tant au service de la nation qu’en opération extérieure. Une réactivité démontrée en février 2022 avec la projection en urgence d’un sous-groupement tactique interarmes en Roumanie auprès du partenaire français, mais qu’il faut maintenant étendre à tous. 

« Les crises futures seront plus dures », constate un commandant d’après qui « il ne faut pas plus d’entraînements mais des entraînements plus adaptés et plus rustiques ». L’évolution est déjà visible sur le terrain, notamment il y a quelques semaines lors de l’ultime phase de l’exercice français ORION. La Défense belge y aura contribué à hauteur d’un bataillon interarmes de près de 600 militaires, un volume rarement mobilisé en exercice ou en opération.

Ce volume de forces envoyé sur ORION, c’est celui que la Composante Terre engagera au cours de l’été en opération extérieure. Environ 150 militaires seront déployés en Lituanie. Près de 250 autres rejoindront la mission Aigle en Roumanie et quelques contingents partiront en Afrique. « J’aimerais maintenir cet effort dans la durée », indique le général Baugnée. 

Le nouveau LCC et son prédécesseur devant le Jaguar, future colonne vertébrale des deux bataillons de cavalerie bientôt recréés au sein de la Brigade motorisée
(Crédits image : Composante Terre/ D. Authelet)
Réussir la transformation SCORPION

« Je suis très fier d’être à la tête d’une Composante avec des militaires hautement professionnels et des équipements de grande qualité, et ce sera encore plus le cas à l’avenir », se félicitait le nouveau LCC. Ce mandat, c’est aussi celui de la montée en puissance du partenariat franco-belge « Capacité Motorisée » (CaMo), symbolisé pour l’occasion par l’étendue de la délégation venue d’outre-Quiévrain pour assister à la cérémonie de passation. « Nous sommes mariés avec la France et il n’y a pas de divorce prévu pour les 30 années à venir », a-t-il rappelé. 

Inédit car total, le rapprochement lancé en 2018 est dès à présent perceptible dans les champs de la doctrine, de l’entraînement et de la formation. Autre enjeu majeur, le volet matériel suivra à compter de 2025, date à laquelle la Brigade motorisée percevra ses premiers Griffon. Ils seront suivis un an plus tard des premiers Jaguar. Des équipements communs à l’armée de Terre qui, s’ils sont autant d’arguments supplémentaires pour recruter et fidéliser, vont aussi monopoliser les unités à tour de rôle et renforceront le défi de l’engagement opérationnel.

Griffon et Jaguar permettront d’équiper de manière organique l’entièreté des unités de la brigade. « Chaque bataillon aura son matériel au complet et à demeure », nous annonce un LCC ingénieur polytechnicien de formation et détenteur d’une vaste expérience dans le domaine des ressources matérielles. Pour autant, la vraie révolution est « invisible ». « La manière de combattre évoluera fortement dans le domaine des systèmes d’information et de communication [SIC]. Nous attendons un échange beaucoup plus rapide de l’information afin de conserver en permanence une longueur d’avance sur l’adversaire », relève-t-il. 

L’arrivée de ces véhicules n’est que l’amorce d’une évolution capacitaire globale. D’autres besoins spécifique pourront trouver une réponse grâce au mécanisme mis en place par CaMo et à la ligne budgétaire de 1,4 Md€ inscrite dans la planification à horizon 2030. C’est le cas de l’artillerie, bientôt densifiée grâce au système CAESAR NG. Le bataillon percevra à terme 28 pièces pour équiper entièrement trois batteries et assurer les formations. Les neuf premiers CAESAR NG ont été commandés l’an dernier. Les 19 exemplaires supplémentaires feront l’objet d’ « un contrat qui est prévu d’être signé cette année-ci ». 

La Composante Terre lorgne sur deux autres plateformes de la famille SCORPION pour muscler davantage ses appuis. « Il nous faudrait des MEPAC », une version « mortier embarquée » du Griffon attendue l’an prochain dans l’armée de Terre. De même, « sans Serval, la Brigade motorisée ne sera ni complète, ni cohérente », note le LCC. À peine entré en service côté français, le petit frère du Griffon jouerait lui aussi plusieurs rôles côté belge. Hormis une version « noeud de communication tactique » (NCT) « absolument indispensable » pour les groupes SIC, le Serval est envisagé pour l’emport de drones, d’un radar de surveillance du champ de bataille mais aussi, hors brigade, au profit du régiment d’opérations spéciales (SOR). 

Enfin, la Composante Terre, tout comme son homologue française, a d’emblée intégré la nécessité de muscler sa défense sol-air. « Je pense qu’il faut se pencher sérieusement sur une capacité anti-aérienne crédible », souligne le général Baugnée. Une défense sol-air très courte portée qui sera « ressuscitée » en misant sur le missile Mistral 3 et deviendra cet autre pion indispensable à la construction d’une Brigade motorisée complète et crédible. 

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