Nexter réussit sa mue

« Nexter fait maintenant plus envie que pitié. Tout le monde veut nous racheter », glisse souriant, Philippe Burtin, PDG de Nexter, en répondant hier aux questions de journalistes durant la présentation des résultats du groupe de défense terrestre. Et le sourire, Philippe Burtin pouvait l’avoir. Le constructeur du char Leclerc a réussi son pari : tourner l’activité du groupe vers l’export. « Notre objectif est atteint par rapport à notre feuille de route 2012 : les prises de commandes sont importantes et progressent de 36% par rapport à 2011 ». D’autant plus que 75% d’entre elles reposent sur des contrats export « le meilleur chiffre à l’export depuis 20 ans ». Les deux principaux succès : l’Arabie Saoudite qui a commandé 264 Aravis équipés de la tourelle Nexter ARX20 pour 412 millions d’euros et des commandes pluriannuelles de gros calibre (120 millions d’euros).

Le tour de force est donc réussi : en seulement quelques années, Nexter a inversé la tendance. L’activité du groupe repose dorénavant principalement sur l’international, dans un marché très compétitif, alors que celui national est en berne. En attente du lancement des programmes EBRC et VBMR sur lesquels Nexter continue de plancher.

Cette transition bien amorcée se traduit pour cet exercice par un chiffre d’affaires en légère baisse (742 millions d’euros pour 2012 contre 851 en 2011) due à une commande nationale qui s’effondre.

Changement de culture

« Nos produits offrent les meilleures performances par rapport à la mission » déclarait Philippe Burtin en expliquant les leviers de cette réussite.

– Une gamme renouvelée : Aravis version logistique, un domaine munitionnaire très dynamique (munitions avec le 25 mm airburst ou le LU107 ; canon tracté Trajan…) ; un VBCI qui se décline (ambulance…) ; mais aussi le lancement de produits nouveaux avec le robot Nerva…

– Amélioration de la performance: dans un domaine extrêmement compétitif, cette mue est aussi passée par l’amélioration de la performance, à savoir le plan Grand Large de baisse de coûts : « les premiers résultats sont encourageants avec 19% d’abaissement en moyenne des coûts des produits. L’objectif reste d’abaisser le prix final à 25% ».

– Innovation dynamique: chenille souple, tablette tactile pour utiliser les informations de la tourelle « en déporté », pliage de tôle en place de soudage… « L’innovation est un processus structuré qui engage nos salariés. » Promouvant l’agilité et la réactivité « notre culture a changé » explique le PDG de Nexter.

– Stratégie commerciale renforcée: 213 demandes de CIEMMG en 2012 ; 14 démonstrations dont 182 jours pour le VBCI, développement des partenariats (Brésil, Danemark, Indonésie, Inde…), le groupe se donne les moyens de percer à l’export.

Prospects 2013

L’artillerie se porte bien. Domaine d’excellence du groupe, Nexter dispose d’une offre très complète, et qui marche. Le canon Caesar, vendu à de nombreux pays le prouve. Nexter est aujourd’hui bien positionné en Inde, un marché gigantesque, notamment avec le Trajan (objectif de 1500 canon 155 tractés…).

Le VBCI est toujours en attente d’une vente à l’export. Le prospect le plus important demeure aux Émirats Arabes Unis, qui a repoussé sa décision. Elle pourrait intervenir au mois de mai. Par ailleurs le 8X8 français fini systématiquement en « short-list » dans les appels d’offres, comme au Danemark ou au Canada. Ce qui n’est pas le cas de ses principaux concurrents Boxer ou AMV de Patria. 2013 pourrait ainsi bien être l’année d’un premier succès export pour le blindé français.

 Tandis que d’autres marchés importants pourraient s’ouvrir, comme le Qatar ou le Koweït.

Consolidation européenne : « grande tristesse »

Le constat est amère : « Les nations continuent de s’équiper sur un mode national, or il faudrait un besoin cohérent et similaire ». Si les discussions se poursuivent, notamment avec l’Allemagne, le sujet d’une restructuration européenne semble bien marcher au ralenti.

En France, les discussions à propos de TDA et de l’entrée de Thales au capital de Nexter « le processus n’est pas bloqué mais suspendu ». Il faut dire que Thales vient de changer de PDG tandis que l’état actionnaire était pris par d’autres dossiers, mais « la piste demeure ouverte »

Un dossier pourrait cependant évoluer cette année, c’est le munitionnaire avec le rachat d’Eurenco : « On est passé du stade de l’hypothèse au projet, le moment est venu ».