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Le désordre américain (ou le résultat du « chaos constructif »)

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CarteC’était il y a 13 ans, New York tremblait en assistant à l’effondrement de ses tours. Le monde, effrayé, découvrait le nouveau visage de la terreur. La suite est bien connue. Saddam Hussein, premier coupable idéal fût désigné. Trop facilement. Puis ce fut l’invasion américaine en Irak. Une guerre déclenchée pour de mauvaises raisons, car on le sait aujourd’hui, le régime de Badgad d’alors, n’a jamais été impliqué dans l’attaque du World Trade Center, ni détenu un quelconque arsenal chimique ou bactériologique. «Mission accomplie» s’exclamait George W. Bush depuis l’USS Abraham Lincoln le 1er mai 2003. C’était il y a 11 ans. Quelles sont les conséquences aujourd’hui de cette opération militaire américaine en Irak ?
 
 
Suite aux âpres combats et au succès de l’opération « Iraqi Freedom », les Etats-Unis, en la personne de Paul Bremer, administrateur américain en chef  de cette nouvelle Irak libérée, décident de dissoudre l’armée et l’administration irakiennes, souhaitant établir un régime démocratique. Résultat, les décideurs politiques et les cadres militaires irakiens majoritairement sunnites sont remplacés par des chiites, la confession majoritaire du pays. Washington oublie alors que les chiites (dans la mouvance des ayatollahs iraniens) sont fondamentalement anti-américains, et bien sûr pro-iraniens.
 
Déstabilisation régionale
Les Américains ont, à ce moment, bouleversé l’équilibre régional, en aggravant la polarisation qui oppose deux axes : les sunnites et les chiites. L’Irak, qui n’était rien d’autre que le principal acteur militaire sunnite dans la région avant 2003, s’est transformé brutalement, du jour au lendemain, en un acteur chiite. Première conséquence : la déstabilisation de l’ensemble des monarchies du Golfe (Arabie Saoudite, Emirats, Bahrain, Qatar…) pourtant fondamentalement pro-occidentales, et qui ont assisté, impuissantes à ce bouleversement des équilibres régionaux en leur défaveur. Autre conséquence, l’Irak, aujourd’hui est devenu un état « failli ». Pire, il s’est transformé en sanctuaire terroriste. Et de ceux de la pire espèce, la génération 2.0, auprès desquels les Al Qaeda divers et variés, sont considérés comme trop « mous ». Les irakiens sunnites, minoritaires dans leur pays mais au pouvoir sous Saddam, n’ayant plus aucune perspective chez eux, gonflent aujourd’hui les rangs de mouvements terroristes, comme Daesh (L’Etat Islamique en Irak et au Levant ou EIIL), né en Irak et qui a grandi dans le chaos syrien voisin. Un mouvement, qui compterait près de 10 000 combattants, aguerris et endoctrinés, et aussi bien armés. Car la nouvelle armée irakienne s’est équipée chez les américains, et en fuyant devant les avancées de Daesh, lui a légué ses matériels.
 
Autre conséquence de l’intervention américaine en Irak, l’émergence d’un Kurdistan. Une population qui se considère comme une nation bafouée, car divisée entre 4 pays : Irak, Iran, Syrie, Turquie. Or, aujourd’hui, les Peshmergas sont alliés aux démocraties occidentales, qui leur livrent des véhicules, des armes, des conseillers ou autres supports aériens. Aujourd’hui dernier rempart contre la chute de l’Irak aux mains de Daesh, demain, ils sortiront renforcés de ces manœuvres, et, à n’en pas douter, revendiqueront leur indépendance territoriale, déstabilisant l’allié turc et les ressources énergétiques irakiennes.
 
Autre pays traditionnellement stable et allié indéfectibles des Etats-Unis, la Jordanie, fragile royauté, se retrouve, elle aussi, secouée. Déjà les camps palestiniens étaient un épineux problème, aujourd’hui, les réfugiés syriens s’entassent dangereusement. Résultat : une montée incontrôlable des islamistes extrémistes.
 
Et que dire aussi de la politique américaine en Israël, qui, par un soutien sans faille à Tel Aviv, aveugle même, n’aide pas à une résolution du conflit israélo-palestinien ? D’autant plus, qu’Israël aujourd’hui,  se retrouve menacé sur l’ensemble de ses frontières : les frères musulmans, qui sont devenus la première force politique de Jordanie ; le Hezbollah libanais, soutenu par l’Iran; les djihadistes de Daesh et le front Al Nosra en Syrie, qui contrôlent la région sensible du Golan et les djihadistes du Sinaï en Égypte. Ce dernier endroit est devenu un haut lieu du terrorisme intégriste et de passage très fréquenté pour les trafics en tout genre vers le territoire israélien. Sans parler de Gaza, repère d’extrémistes en tout genre.
 
Et la Libye, enfin, nouvelle terre d’accueil pour djihadistes, où viennent se retrouver les combattants des conflits irakien, syrien, malien et bien d’autres… Car il s’agit bien ici des mêmes hommes, des mêmes mouvements djihadistes salafistes. Cette « international du terrorisme », qui ironiquement, a pu s’épanouir grâce à la volonté hégémonique américaine de démocratiser le monde arabo-musulman.
 
Mais demain, les frappes américaines et alliées dont parle Obama, ne risquent-elle pas de disperser de nouveau cette mouvance djihadiste, comme cela a été le cas en Afghanistan en 2001, avec le risque de créer d’autres foyers déstabilisateurs, comme c’est le cas au Yémen, au Mali, en Somalie, au Nigeria ou au Sahel ?
 
 

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