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Le Chef d'Etat Major de l'Armée de Terre: « Les limites sont atteintes »

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Crédits: Ministère de la Défense

Crédits: Ministère de la Défense


Le général jean-Pierre Bosser, le nouveau chef d’état major de l’armée de terre (CEMAT) a été auditionné par le Sénat dans le cadre du projet de loi de finances 2015. Pour l’un de ses premiers passages devant la représentation nationale, il a dressé un  état des lieux sans concession, franc et lucide sur ce qu’est l’armée de terre aujourd’hui, mais aussi prévenu sur les limites que sont capables d’encaisser les terriens…
Extraits.
« L’année 2015 est un jalon capital pour la défense et l’armée de terre » a débuté le CEMAT, considérant l’année à venir comme « une année de vérité »
 
Une armée très employée
L’armée de terre conserve toute la gamme de capacités mais est très sollicitée. Aujourd’hui, « 12 000 soldats de l’armée de terre assurent la protection de leurs concitoyens en remplissant des missions de sécurité intérieure. 12 000 autres sont déployés chaque jour hors de métropole, dont plus de la moitié en opérations extérieures. » Au total, c’est donc « 22 000 soldats et plus de 3 000 matériels majeurs qui sont tous les 4 mois en posture opérationnelle »
Décrivant la réactivité des forces françaises terrestres, le CEMAT est revenu sur l’opération Serval, en apportant quelques précisions intéressantes sur la réactivité de l’armée : « En moins de 10 jours, nous avons déployés 4 000 hommes et 10 000 tonnes de matériel, soit l’équivalent de ce que nous avions fini de désengager d’Afghanistan.»
Les opex pèsent très lourdement sur l’armée de terre : « Entre 2008 et 2013, 109 véhicules terrestres ont subi des dommages de guerre lourds dont la moitié par IED, et 10 hélicoptères ont été touchés par des tirs directs. »
Revenant sur l’opération Barkhane : « l’extrême mobilité de nos adversaires, dans un espace incontrôlable en raison de son immensité, grande comme dix fois la France, soit la taille de l’Australie, pose en réalité des défis colossaux »
 
Les défis de l’équipement
S’agissant des équipements, les prochaines années sont « déterminantes » a t-il précisé, et « la pertinence de nos choix capacitaires sont confirmés par leur mise à l’épreuve systématique en opération ».
Reste que « Les reports de commande et de livraison étirent la période de recouvrement entre deux générations de matériels vers un écart trop important. Nous sommes contraints d’employer des équipements d’ancienne génération qui sont arrivés en limite d’évolutivité. » Comme le VAB. « La bonne maîtrise du vieillissement de ces matériels hors d’âge, qui devra être assurée pour encore une quinzaine d’années, a un coût qui peut devenir prohibitif ».
Autre problème, « la régénération des matériels revenant d’opérations extérieures constitue, depuis le retour d’Afghanistan pour la chaîne de la maintenance, un défi à la mesure de l’enjeu qu’elle représente pour l’armée de terre. A ce jour, environ 1 500 engins rentrés d’Afghanistan et du Liban et 500 du Mali doivent être remis en état (dont 600 VAB -pour 1/2 de l’INF-, 300 camions et 140 VBL). Cela représente l’équivalent du matériel en service dans 23 régiments. La reconnaissance d’une bonne partie de ce besoin et son financement à hauteur de 113 millions d’euros sur la période de la LPM permet de procéder à une première étape de la régénération, portant sur environ 300 VAB pour un montant de 50 millions d’euros d’ici à 2015 (dont 24 millions d’euros au titre du PLF 2015). A la date d’aujourd’hui, seuls 102 VAB sur les 620 concernés sont déjà retournés dans les forces ».
 
Scorpion
Constat sans appel : «  la LPM 2014-2019 ne suffira pas pour atteindre les objectifs capacitaires visés puisque l’étape 1 ne portera que sur moins de 50% du besoin et qu’elle prévoit seulement la livraison de 92 VBMR sur 980, repoussant à 2020 celle des 4 premiers EBRC sur 110 ainsi que la rénovation des 12 premiers XL sur 200. »
 
Moral en berne
Cela fait frémir : « les objectifs fixés dans la LPM à 90 journées de préparation opérationnelle (JPO) et à 180 heures de vol, hors simulation, ne sont pas atteints. Ces insuffisances se traduisent par des renoncements en termes de capacités opérationnelles. »
Manque de préparation, déflation, restrictions budgétaires… autant de facteurs qui impacte le moral, lourdement.

« Alors que nos soldats affichent un remarquable état d’esprit en opération, leur moral en garnison ne parvient pas à s’élever au-dessus d’un niveau qui reste moyen, fragile et qui confirme d’année en année sa lente érosion. »
Le constat est sans appel : « les limites sont atteintes ».
« Dans le fonctionnement courant, il n’y a plus d’économies possibles » alors même que « l’année 2015 se traduit par une hausse de 25% des déflations pour l’armée de terre » soit 4000 postes !
 
Vers un nouveau modèle
« L’évolution des menaces, mais aussi la charge de déflation qui nous est imposée nécessitent de réfléchir une organisation qui redonne à l’armée de terre de la stabilité et de la profondeur, » a indiqué aux sénateurs le CEMAT, qui souhaite « une architecture à la fois plus lisible et plus pérenne, qui présente une chaîne de commandement plus simple et plus verticale. » Ainsi le nouveau modèle de l’armée de terre «  s’appuiera sur trois maillons indissociables et parfaitement intégrés que sont les ressources humaines, la maintenance logistique et les forces terrestres. Trois pôles d’excellence seront valorisés dans ce but : les forces spéciales, l’aérocombat et notre expertise du territoire national. »
 
L’intégralité de l’audition est accessible ici

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