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La France face au défi du nouveau cap budgétaire proposé par l’OTAN

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Ce sera 3,5% et non plus 2%. Les pays de l’OTAN se dirigent depuis ce mercredi vers une hausse majeure de leur part de PIB consacré aux investissements de défense. L’effort proposé doit encore être approuvé fin juin au sommet de La Haye, mais il s’annonce d’ores et déjà difficile à réaliser pour un allié français confronté à un écueil budgétaire sans précédent. 

« Je proposerai un plan d’investissement global qui totaliserait 5 % du PIB en investissements dans la défense », annonçait le secrétaire général de l’OTAN, le Néerlandais Mark Rutte, en marge d’une ministérielle organisée ce mercredi à Bruxelles. Des 5% consentis, 3,5% seraient focalisés sur la défense proprement dite. La tranche de 1,5% restante alimenterait les investissements « liés à la défense et à la sécurité au sens large, notamment dans les infrastructures et la résilience ». 

Le coeur de l’effort « est basé sur ce qu’il en coûtera pour atteindre les nouveaux objectifs capacitaires que les ministres viennent d’approuver », poursuivait Mark Rutte. Défense aérienne, avions de chasse, chars, drones, personnel, logistique « et bien plus encore » : les Alliés ont reçu de nouvelles cibles à atteindre en matière de capacités critiques, autant de bases d’un nouveau plan d’investissement de défense (NDPP) qui sera validé dans quelques semaines aux Pays-Bas. 

Rares sont les pays qui s’épanchent sur la teneur d’objectifs nationaux qui viendront se superposer à ceux non ou partiellement accomplis au cours du dernier cycle NDPP. Le Grand-Duché de Luxembourg est l’une des ces exceptions. Celui qui est souvent considéré – à tort – comme un petit Poucet travailler principalement au renforcement de la défense aérienne et antimissile, des drones de reconnaissance et drones de combat, du ravitaillement en carburant, de la logistique sur les arrières, et du soutien médical via un hôpital militaire avancé belgo-luxembourgeois. Ceux de la France demeurent inconnus mais une chose semble certaine : la marche financière associée s’avèrera particulièrement difficile à franchir. 

Ce palier minimal des 3,5%, certains comme la Pologne, l’Estonie, les États-Unis ou encore la Grèce le franchissaient ou s’en approchaient déjà en 2024. D’autres doivent encore amorcer ce sursaut, à commencer par la France. Ses dépenses militaires dépassaient de peu, l’an dernier, les 2% demandés 10 ans plus tôt, et ce après plusieurs marches budgétaires parfois acquises de haute lutte. Reste que le président de la République l’a évoqué début mars au cours d’un sommet de l’UE : les pays européens doivent porter leur budget à 3%, voire à 3,5% du PIB pour garantir leur défense.

Le Haut-commissariat à la Stratégie et au Plan s’est justement essayé au jeu de la prospective financière. Selon les estimations d’une note flash présentée mi-mai, il en coûterait 120 Md€ (en euros courants) par an à l’horizon 2030 pour parvenir aux 3,5% de PIB investis dans la défense. Ou 172 Md€ pour aboutir aux 5%. Soit, respectivement, plus du double et du triple de l’enveloppe proposée pour 2025, établie à 50,5 Md€. Et bien au-delà du dernier palier prévu par la loi de programmation militaire en fin de décennie, fixé à 67,4 Md€.

Est-ce réalisable ? Rien n’est moins sûr car, au risque de se répéter et contrairement au reste de l’Alliance, la France est confrontée à la détérioration de ses finances publiques et aux difficultés d’emprunt qui en découlent. « Depuis 2025 nous consacrons plus d’argent aux intérêts de la dette, détenue à plus de 50% par des créanciers étrangers, qu’à notre défense. Et l’on peut craindre que les choses ne s’améliorent pas dans les années à venir », constatait le sénateur Dominique de Legge, auteur d’un rapport sur l’exécution de la LPM 2024-2030.

Les marges de manoeuvre du ministère des Armées sont en effet réduites, voire inexistantes d’avis de sénateurs. « Compte tenu de son ampleur, cet effort ne peut pas reposer sur une solution-miracle. La situation française doit être regardée avec lucidité : nos marges en dépenses publiques, en prélèvements obligatoires et en endettement sont épuisées, au regard de tous nos partenaires européens », estimait quasi simultanément le Haut-commissaire au Plan, Clément Beaune. Dit autrement, respecter la trajectoire de la LPM telle que définie en 2023 s’avère déjà être un petit exploit en soi. La rehausser sera un défi d’une toute autre ampleur. 

Des options existent cependant, relève l’équipe du Haut-commissariat, à l’image d’une maîtrise des dépenses, d’une hausse d’impôts et du taux d’emploi ou de la combinaison de ces trois leviers avec celui de l’endettement commun au niveau européen. Bref, tout effort de défense radical suppose des solutions tout aussi radicales, indique une note pour qui la clé reste l’Europe. Qu’importent la trajectoire et les solutions retenues, celles-ci ne pourront l’être qu’en lien avec le Parlement, estiment des sénateurs « soucieux ». Un dialogue nécessaire pour résoudre une équation budgétaire déjà complexe avant que les ambitions à la hausse de l’OTAN viennent ajouter de nouvelles inconnues. 

Crédits image : X / ministère des Armées

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