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Comment Nexter Arrowtech veut armer drones et robots

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Entre deux obus de char ou d’artillerie de nouvelle génération, les équipes de Nexter Arrowtech ont commencé à réfléchir à une munition d’un nouveau type, une « unité agressive » conçue pour être intégrée sur plusieurs types de vecteurs, dont des drones et des robots terrestres.

Une « unité agressive » pour tout vecteur

« Nous sommes en train d’ouvrir une nouvelle page du combat terrestre », nous annonçait la division munitionnaire de Nexter la semaine dernière à Bourges. Derrière « ce nom un peu barbare » qu’est l’unité agressive se cache une réflexion autour d’une tête militaire fournissant différents effets et adaptée à une intégration sur des vecteurs au sens large. Nexter Arrowtech n’exclut aucune piste mais impossible, sur base de cette seule définition, de ne pas penser à un usage à partir d’un micro-drone, application dont l’efficacité nous est rappelée presque quotidiennement par le conflit russo-ukrainien. 

L’attaque par les micro-drones « devient déjà une réalité », constate en effet le groupe français.« Nous avons compris que le marché changeait, que les besoins changeaient (…). Nous pouvons donc imaginer des drones durcis équipés d’objets pyrotechniques qui vont délivrer un effet sur le terrain ». 

Redoutable car peu onéreux, facile à réaliser et difficile à détecter, le procédé inquiète autant qu’il intéresse les état-majors. « Des études commencent à être sélectionnées pour rechercher des dronistes et rechercher des munitionnaires capables de faire ça », complète Nexter. C’est désormais le cas en France, où le ministère des Armées cherche autant à s’en prémunir au travers du programme PARADE qu’à en évaluer l’intérêt au travers des projets COLIBRI et LARINAE.

Nexter ne devra pas aller chercher trop loin pour vérifier la pertinence de son idée. Sa branche robotique dispose de plusieurs vecteurs potentiels, tant aériens que terrestres. Ce sont les micro-drones IXOS XX et IXOS LG, dévoilés en 2019 respectivement dotés d’une capacité d’emport de 2,5 kg et 1,5 kg, et le robot léger Nerva LG, qu’on ne présente plus. Tous trois ont démontré leur capacité d’intégration sur un véhicule porteur, TITUS et Leclerc en tête. Ces trois exemples n’existent aujourd’hui que sur papier mais sont représentatifs « de ce qu’il va se passer dans les années qui viennent », estime Nexter. 

De faux airs de Bonus

Si plusieurs types de charges sont envisagées, les équipes de Nexter Arrowtech planchent tout particulièrement sur une « charge à génération de noyau » (CGN) dont le principe avait été exploité pour l’obus antichar Bonus. Cette CGN, c’est le fruit de la déformation d’un revêtement en métal par une charge explosive. Devenu projectile, le noyau de métal atteindra sa cible en un point assez précis et à très grande vitesse, rendant la munition particulièrement performante contre des chars dont le toit est généralement moins protégé.

Cette nouvelle charge diffère néanmoins du Bonus. Celui-ci est un projectile d’artillerie emportant ses propres dispositifs de détection et de visée, quand l’unité agressive dépendra d’un système porteur et de ses capteurs pour approcher et toucher sa cible. En découlent certains enjeux, qui seront de pouvoir « la rendre plus petite, moins chère et la produire plus facilement ».

Le drone IXOS LG, dévoilé en 2019, pourrait être un vecteur adapté pour l’emport d’une « unité agressive » (Crédits : Nexter)

Pour diminuer les coûts, l’industriel a cherché à remplacer le matériau « rare et cher » du Bonus par un substitut au moins aussi efficace, innovant et compatible avec la production en série. De ce matériau, nous n’en saurons par plus hormis qu’il est notamment constitué d’un nickel « produit par un procédé très spécial ». 

Là où la charge du Bonus sera suffisamment puissante pour engager à 200 m, cette CGN ne déclenchera sa mise à feu qu’une fois parvenue au plus près de sa cible. Dans ce combat entre le char « Goliath » et le drone « David », le second aura l’avantage de pouvoir tourner autour du premier pour déterminer son point faible. La limitation de la charge se trouvera alors compensée par la capacité de mouvement du vecteur.

Une autre différence relève de « la technique de compression des explosifs ». Ici, la charge est constituée à partir d’une compression uni-axiale et « bon marché », contrairement à la compression isostatique utilisée pour le Bonus. La méthode n’a pas empêché d’atteindre une qualité suffisante pour former le type de noyau recherché. Selon Nexter, cette nouvelle CGN est parvenue à un niveau de maturité assez avancé (TRL 4). Ne reste qu’à franchir les deux prochains échelons de développement avant d’envisager une éventuelle commercialisation. 

Ne pas laisser le choix de la sécurité

Fournir cette solution à un droniste tiers implique de « ne pas lui laisser le choix de la sécurité ». Un brouillage, voire une réutilisation du vecteur par l’adversaire ne peuvent être exclus. La conception de la charge s’accompagne donc automatiquement de celle d’un dispositif de sécurité qui, à l’aide d’un code de sécurité individuel, autorisera ou non la détonation ou déclenchera un processus de neutralisation en cas de défaut de lecture.

Pour Nexter, il pourrait s’agir soit de déclencher la charge en limitant les effets collatéraux, soit de paralyser l’ensemble du système. « Nous mettrons, autour des composants électroniques et du détonateur, une mousse pyrotechnique qui brûle doucement » de manière à les paralyser définitivement et à empêcher toute récupération par l’adversaire. 

De même, l’envoi d’un code défini reviendra à détruire le système d’amorçage par SLAPPER LEEFI, un initiateur d’explosif secondaire basse énergie. Ce type d’amorce, également retenu pour le futur obus de précision Katana, exclut l’explosif primaire, élimine le plomb et respecte la réglementation REACH imposée à compter de 2025 par l’Europe. Il faudra, enfin, que le mécanisme de sécurité soit réversible et puisse être alimenté par le vecteur. Ici aussi, la patience est de mise. Ambitieux et délicat, le processus de R&D n’en est qu’à ses débuts (TRL 3).

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